Vichy a donc été, dès le début, tout disposé à livrer ces juifs à l'Allemagne - enfants compris. Nés en France, exclusivement francophones, mais issus de parents étrangers, ils n'étaient 'pas vraiment français'. Sur 300.000 juifs de France, 75.000, aux deux tiers d'origine étrangère, ont été tués. Vichy a souvent fait plus que les Allemands pour capturer des juifs, étrangers ou citoyens français.
Ceci n'infirme pas le texte de 1961 et, au contraire, le confirme.
Vichy, par Bousquet interposé, a négocié (le 2 juillet 42, 72 avenue Foch) ce que j'ai appelé un troc, le troc de Bousquet.
Il se résume ainsi.
D'abord, Bousquet refuse de livrer qui que ce soit car le Maréchal est opposé à ces déportations.
A ce moment Knochen intervient :
"Ne craignez vous pas d'irriter le Führer ?"
"Puis-je faire une contre-proposition ?" dit alors Bousquet.
"Parlez" répond Knochen.
"Si nous vous livrons les Juifs étrangers renoncerez-vous aux Juifs français ?"
" C'est d'accord".
Bref, la livraison a bien été faite et dans les deux zones et elle continue de donner lieu à toutes les interprétations défavorables imaginables.
En même temps, elle honore cette politique globale de l'esquive, dilatoire et temporisatrice de Vichy, dont j'ai souvent parlé puisqu'elle a retardé suffisamment le processus de destruction dans son ensemble et explique le sort relativement plus clément de la communauté juive de France dont a parlé Poliakov.
Savez-vous qu'on a restitué sa Légion d'Honneur à Bousquet ?
Effectivement, en juillet-aoùt 42, une déportation n'était nullement synonyme de mort ou de mauvais traitements. Elle s'inscrivait dans une longue liste de personnes déplacées : deux millions de prisonniers, déportés du travail, etc. |