M. Delpla raconte : "Dans tes deux messages censés montrer que je n'ai ni preuves, ni arguments, par un mot sur le témoignage de Selvester ni sur le dossier permettant d'établir son sérieux, et le caractère mensonger de celui de Murphy." Il faut dire que j'ai déjà de nombreuses fois réfuté ce que M. Delpla déduisait du témoignage du capitaine Selvester, outre d'avoir totalement pulvérisé les accusations de falsification adressées au pauvre colonel Murphy, qui n'en méritait pas tant. Je n'ai pas cru bon de devoir me répéter une nouvelle fois. A tort, me semble-t-il, tant il est vrai que vous ne tenez pas compte de mes objections.
En ce sens, les erreurs de chronologie du capitaine Selvester s'expliquent par de très naturelles lacunes mémorielles, résultant du fait qu'il s'exprime vingt ans après les faits, et que sa mémoire n'est donc plus totalement fraîche.
Le témoignage humain, rappelons-le, n'est pas sans limites, en particulier lorsqu'il est énoncé plusieurs années après les faits. Il ne saurait être pris pour argent comptant, et nécessite d'être comparé avec les autres sources accessibles, en particulier les documents d'époque. M. Delpla commet ainsi une erreur méthodologique flagrante en donnant raison à un seul témoin contre tous les éléments du dossier qui le contredisent.
Par ailleurs, je peine à comprendre cette vaine controverse sur les horaires. A suivre M. Delpla en effet, il serait hautement improbable que Himmler ait pu dissimuler dans sa bouche une capsule de cyanure de 16 heures à minuit (en fait, les horaires doivent être ramenés de 19 heures à un peu plus de 23 heures). La chose n'est nullement démontrée. Et ne risque pas de l'être.
D'une part en effet, M. Delpla reconnaît que Himmler avait la capsule en bouche à Lüneburg même. Or, soit il pouvait la dissimuler, soit il ne le pouvait pas. Bref, M. Delpla reconnaît lui-même (sans vraiment l'avouer) qu'il était tout à fait possible de dissimuler une telle capsule dans sa mâchoire, et pendant plusieurs heures. A noter que Himmler s'est exprimé, à Lüneburg, sans que personne ne remarque rien d'anormal.
Bref, contrairement à ce qu'allègue M. Delpla, Himmler avait largement la possibilité de conserver sur lui - dans sa bouche - une capsule de cyanure. M. Delpla n'a d'ailleurs jamais apporté la moindre explication crédible au fait que, de l'aveu du capitaine Selvester lui-même, deux étuis censés renfermer chacun une capsule de cyanure avaient été retrouvés sur Himmler, l'un d'entre eux étant vide... A moins de considérer que ce grand bênet de Himmler aurait perdu ladite capsule !
M. Delpla fait grand cas d'une incertitude entourant l'origine de la fouille de Himmler. Le capitaine Selvester prétend l'avoir effectuée de sa propre initiative. Le colonel Murphy, arrivé une ou deux heures après l'identification du Reichsführer (20 ou 21 heures), le conteste vigoureusement, et s'attribue la fouille. Difficile de trancher, car les deux témoignages sont tout aussi précis l'un et l'autre. Le colonel Murphy ajoute que "during all my time with Himmler he had no form of refreshment", ce qui ne dément d'ailleurs pas l'hypothèse selon laquelle Selvester, avant l'arrivée de Murphy, aurait servi au S.S. boissons et nourriture.
De cete divergence mineure, que M. Delpla exagère pour mieux asseoir sa thèse ruinée, on pourrait supposer, soit que Selvester commet une erreur de mémoire, et que la fouille a été pratiquée par lui et supervisée par Murphy, soit que Murphy cherche à se donner le beau rôle dans une histoire où il ne l'a pas (n'a-t-il pas perdu la plus belle prise des Britanniques ?). Rien à voir avec un complot, donc, mais tout avec les faiblesses de la mémoire ou la vanité humaine...
La pauvreté de la réponse de M. Delpla prouve, s'il en était encore besoin, qu'il n'a décidément plus aucun "argument" à opposer à la réalité du suicide.