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| | Rappelé au service / WeygandEn réponse à -9 -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 Le 13 juin : version Spears/Mandel de Francis Deleu le jeudi 16 août 2007 à 20h49
Bonsoir,
Le 13 juin 1940, le Conseil des ministres est réuni au château de Cangé non loin de la ville de Tours. La réunion est houleuse. La discussion porte notamment sur une demande d'armistice réclamée par Maxime Weygand. Le Conseil est interrompu par l'annonce d'une insurrection communiste à Paris et l'installation de Maurice Thorez à l'Elysée. L'incident est relaté par Benoist-Méchin, Soixante jours qui ébranlèrent l'Occident, Tome 2, p.177, Editions Albin Michel, 1956. Nous en donnons le résumé ici : Le "bobard" du 13 juin 1940
Edward Spears, La Chute de la France, p.255/256, Presses de la Cité, 1964, en donne une version différente, celle de Georges Mandel. La retranscription de l'entretien ci-dessous !
En 1940, le général britannique Edward Spears est l'agent de liaison entre Winston Churchill et le gouvernement français. Au soir du 13 juin, il tente d'en savoir plus : Comme je m'enquiers de l'endroit où je pourrai trouver quelqu'un qui me renseigne sur ce qui s'est passé, il me dit que Mandel est à Tours, à la préfecture. J'y vais et je le trouve assis derrière le bureau du préfet, aussi froid et précis que jamais. Son air de détachement est celui que pourrait avoir un biologiste informant un collègue de la conduite étrange de quelque invertébré soumis à une certaine forme d'expérience. Il commence par me dire que Weygand a essayé de créer la panique en racontant que les communistes avaient pris le pouvoir à Paris, que Maurice Thorez s'était installé à l'Elysée, que la foule avait désarmé la police et la Garde républicaine et que les communications avec Paris étaient coupées.
Mandel savait que tout cela était absurde, puisqu'il avait communiqué une demi-heure plus tôt avec le préfet de police qui était toujours à Paris. Aussi, il avait adopté la simple méthode de demander le préfet au téléphone. Il l'obtint aussitôt et lui dit que le général Weygand, qui était debout à côté de lui, avait été informé que les communistes avaient pris le pouvoir à Paris et que l'émeute y sévissait. "Je passe l'écouteur au général Weygand, voulez-vous lui dépeindre la situation ?" Un singulier éclair de malice passe dans les yeux glauques de Mandel quand il me décrit la déconfiture de Weygand.
Mais il ne semble pas que cet avatar ait eu sur Weygand un effet durable, car, un instant plus tard, il s'attaque aux ministres qui, dit-il, auraient dû rester à Paris, comme le Sénat romain qui avait attendu les barbares à Rome.
"Quel bien cela pouvait-il faire ?" dis-je, étonné, "les Allemands les auraient ramassés, mis dans des voitures cellulaires et expédiés vers une destination inconnue."
"Exactement", dit Mandel, "Weygand révélait par cette phrase son désir d'en être débarrassé.
Weygand continua en disant que, s'ils n'avaient pas assez de coeur pour rester à Paris, ils devraient avoir au moins le courage d'annoncer qu'ils ne quitteraient la France sous aucun prétexte."
"Il paraît avoir été bien grossier" dis-je. "Il l'était, en effet", répond Mandel, "soit par calcul, soit dans un accès de rage hystérique" . "Voulez-vous dire que personne ne l'a remis à sa place ?" "Non" , dit Mandel, "pas plus que quand il a déclaré qu'il allait faire arrêter le général de Gaulle pour avoir pris des mesures en vue d'envoyer des hommes et du matériel en Afrique du Nord, sans le consulter. Après tout, de Gaulle a le rang de ministre mais Weygand se moque bien des ministres. Il nous accuse d'être incapables de prendre une décision et dit que ceux d'entre nous qui prêchent la résistance dissimulent leur poltronnerie en faisant montre de bravoure verbale."
"Mais c'est fantastique", m'écrié-je, "vous n'allez pas me dire que personne n'a protesté, pas même le Président de la République ?"
"J'ai fait quelque chose", dit Mandel, "j'ai souri. Là-dessus Weygand a dit qu'il était insulté, ramassé ses jupes comme une « prima donna » et sans même une révérence devant le rideau, s'est précipité hors de la salle. Il était tellement hors de lui qu'il a déclaré, une fois dehors, à mon secrétaire particulier que les ministres étaient fous et qu'ils devraient être arrêtés."
C'est à mon tour de sourire. Je n'avais pas de difficulté à imaginer la scène. "Mais, sûrement, il y a autre chose derrière tout cela. Il n'a pas dû se contenter d'injurier le gouvernement." Mandel me raconte alors ce qui s'était passé au Conseil des ministres de la veille (le 12). Weygand avait décrit la situation à peu près dans les termes qu'il avait employés à Briare, mais je dresse les oreilles en entendant dire qu'il a prétendu que Churchill avait refusé d'envoyer des avions de chasse. (...)
Bien cordialement,
Francis. |
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