Brasillach! Péché contre l'esprit? Victime ou coupable du poids de
mots? Fallait-il le fusiller? Autant de questions aux réponses incertaines ! De
tous les écrivains, il fut le seul, à ma connaissance, à subir le
châtiment suprême. Maurras fut condamné à la détention perpétuelle; Henri
Béraud, prix Goncourt, fut condamné à mort puis gracié et libéré en 1950;
Drieu de la Rochelle préféra se suicider en apprenant son arrestation.
Bien sûr les procès de l'épuration ne furent pas des modèles de justice
équitable! Bien sûr, on peut être troublé par la pétition signée par 56
intellectuels pour demander la grâce de l'écrivain condamné. Parmi le
signatures, celles de Valéry, Claudel, Duhamel, Gabriel Marcel, Marcel Aymé,
Mauriac...
François Mauriac que Brasillach n'épargna pas, intervient directement
auprès du général de Gaulle. Ce dernier aurait déclaré:
"Il paiera. A son degré d'intelligence, il ne
pouvait ignorer le choix qu'il faisait. La trahison de l'intellectuel... le
péché contre l'esprit..."
Il nous faudra lire l'ouvrage d'Alice Kaplan pour mieux comprendre la
responsabilité de l'écrivain qui égara son talent dans la polémique, qui fut
séduit par le fascisme et dont les mots pouvaient faire autant de mal que
les armes ou les lois d'exclusion.
Regrettons toutefois que, soixante ans plus tard, sous le couvert d'une
réhabilitation de l'écrivain de talent mais de l'écrivain seul en gommant
l'homme dévoyé, renaissent de leurs cendres les remugles d'un passé que
l'on croyait révolu.
Bien cordialement,
Francis.