L'ex-anonyme prétend répondre à mon article, dans lequel je réfutai, une fois de plus, ses "erreurs" constamment répétées comme si de rien n'était.
En vertu de sa stratégie de mauvaise foi notamment décortiquée ici, l'ex-anonyme prétendait que Vichy ne savait rien de l'extermination des Juifs, et se référait notamment à un témoignage formulé par Raymond Aron dans les années 1980 : "Les juifs, dit Raymond Aron, on pressentait qu'ils connaissaient des conditions d'existence très dures, mais l'extermination systématique de tout un peuple, ça, non, on ne l'imaginait pas."
J'ai rappelé que la citation exacte était la suivante (Raymond Aron, Mémoires. Cinquante ans de réflexion politique, Julliard/Pocket, 1983, p. 242) : "Qu'en savions-nous à Londres ? Les journaux anglais l'ont-ils évoqué ? S'ils l'ont fait, était-ce hypothèse ou affirmation ? Au niveau de la conscience claire, ma perception était à peu près la suivante : les camps de concentration étaient cruels, dirigés par des gardes-chiourme recrutés non parmi les politiques mais parmi les criminels de droit commun ; la mortalité y était forte, mais les chambres à gaz, l'assassinat industriel d'êtres humains, non, je l'avoue, je ne les ai pas imaginés et, parce que je ne pouvais pas les imaginer, je ne les ai pas sus."
Et j'ai rappelé quelques éléments :
Cette citation, autrement plus complète que celle fournie par l'ex-anonyme, permet de déterminer que Raymond Aron s'exprime en qualité de témoin, quarante ans après les faits, un témoin qui, de toute évidence, se trompe lorsqu'il s'interroge sur la prétendue absence de publication d'informations sur l'extermination dans la presse britannique, comme je l'ai rappelé ici.
Anne Frank, dans sa mansarde d'Amsterdam, était semble-t-il mieux informée et plus lucide que le Raymond Aron de 1942. Le 9 octobre 1942, elle écrit dans son Journal : "Nous n’ignorons pas que ces pauvres gens [les Juifs raflés] seront massacrés. La radio anglaise parle de gazages ["De Engelse radio spreekt van vergassing"]... Peut-être est-ce encore le meilleur moyen de mourir rapidement. J’en suis malade..."
En toute hypothèse, Raymond Aron précise bel et bien qu'à cette époque, les "camps de concentration étaient cruels, dirigés par des gardes-chiourme recrutés non parmi les politiques mais parmi les criminels de droit commun ; la mortalité y était forte", bref que la déportation des Juifs et leur internement étaient un véritable enfer. Ce qui reste accablant pour Vichy.
Car le fait est que Raymond Aron n'était alors qu'un journaliste de la France libre, alors que Vichy pouvait bénéficier de moyens d'information autrement plus conséquents en sa qualité de gouvernement en contact direct avec les Allemands - ce qui facilitait la diffusion des secrets et des rumeurs - et bénéficiant de services d'écoute et d'espionnage.
Vichy avait d'autant plus intérêt à s'informer qu'il participait directement à ce que Raul Hilberg a qualifié de "processus de destruction", excluant, fichant, arrêtant, internant et livrant aux Allemands les Juifs de France, majoritairement étrangers. La responsabilité de Vichy au regard de la diffusion de l'information est donc infiniment plus grande.
Bref, agiter cette citation tardives des Mémoires de Raymond Aron comme un hochet pour démentir le fait qu'en 1942, tout un chacun, et en particulier Vichy, avait les moyens de déterminer que le sort des déportés serait funeste, me paraît peu pertinent, à tous points de vue.
Et c'est d'ailleurs parce que l'ex-anonyme en est peut-être conscient qu'il va laisser tomber, une fois de plus, la thèse de la prétendue "ignorance" vichyste pour réactiver l'inepte théorie du sauvetage... Et ce faisant, répéter les mêmes inepties déjà réfutées.
La réponse de l'ex-anonyme vaut son pesant de popcorn. Il ne répond à rien, se plaint, et se contente de noter : "Pour ne prendre qu'un exemple de son manque de logique, ne vient-il pas de nous dire ici même que le texte de Raymond Aron date de 1942 et qu'il se trouve dans ses Mémoires publiées dans des années 80 ?!"
Il suffit de confronter sa remarque avec mon texte. A aucun moment je n'ai daté le texte de 1942.
De toute évidence, l'ex-anonyme rencontre quelques difficultés de compréhension, ou de lecture. Francis Deleu a formulé une hypothèse pertinente : l'ex-anonyme aurait confondu la pagination de ma source citée avec l'année 1942.
Une autre explication est recevable, et Francis Deleu l'a également devinée. L'ex-anonyme n'aurait peut-être pas compris cette phrase : "Anne Frank, dans sa mansarde d'Amsterdam, était semble-t-il mieux informée et plus lucide que le Raymond Aron de 1942." Mais il va sans dire que lorsque j'évoque "le Raymond Aron de 1942", je fais référence à son témoignage de 1983 évoquant sa perception de la "Solution finale" en 1942. Là encore, il n'est nullement question, chez moi, de dater son témoignage de 1942.
Bref, l'ex-anonyme semble ne pas comprendre les textes qu'il lit. Inquiétant, pour un individu qui se revendique avocat de Pétain et Laval. |