je vois ce que tu veux dire, mais à aucun moment il ne faut oublier le tentateur, ce nazisme qui s'ingénie à salir ceux qu'il fréquente.
Pétain, Laval et Darlan sont également abjects... et également "agis" par l'occupant, qui leur présente leur propre abjection comme le moindre mal. Dans ces conditions la responsabilité est égale, de même que les circonstances atténuantes. Avec chacun, le Reich presse le citron au maximum, en fonction de ses aspirations du moment. Personne n'est traître, du moins au sens classique et carré du terme. Tout le monde croit être en train de sauver quelque chose ou quelqu'un. Sincèrement ! et comme je le dis souvent, la bêtise ne saurait être un délit.
L'assassinat de Mandel offre un exemple parfait : il donne à Pétain et à Laval une furieuse envie de démissionner et une raison de ne pas le faire (ce qui, en ce début juillet 44, ferait TRES mal au Reich en brisant les liens d'obéissance des Français légalistes au moment où leur pays est en train d'être libéré) : car Abetz a annoncé que derrière Mandel, Blum et Reynaud suivaient; donc, si plus de Pétain-Laval, un Etat entièrement milicien et ultra-collabo qui se ferait un plaisir de coller au mur Blum puis Reynaud après un procès expédié; donc ils se sentent utiles et sauveurs, quand bien même ils savent qu'ils ne pourront le dire à leur procès sans faire rigoler tout le monde : en plus, ils se sacrifient noblement et (presque) en silence !
Mais trois ans plus tôt, sous Darlan, au printemps 41, répétition générale : le Reich commence à fusiller des Français de base (anciens gardes territoriaux) puis dit qu'il veut bien les épargner si on lui livre, pour exécution immédiate, Mandel et Reynaud... et Darlan donne son accord, dans des conditions telles qu'on est obligé de supposer que Pétain aussi : du coup c'est Hitler qui recule... car ce meurtre viendrait trop tôt, notamment parce que l'instrument de chantage se révèle excellent ! Tout d'un coup il ne réclame plus que l'enfermement à vie des deux ex-ministres sur le sol français.
Avant de les cueillir de sa main le 11 novembre (!) 1942 au fort du Portalet sans que Pétain ait esquissé un geste pour les mettre à l'abri en Espagne. |