Histoire de délimiter les thèses en présence - La Suisse et la guerre 1933 - 1945 - forum "Livres de guerre"
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La Suisse et la guerre 1933 - 1945 / Werner Rings

En réponse à -13 -12 -11 -10 -9 -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2
-1c'est la what if de Christian Rossé

Histoire de délimiter les thèses en présence de Nicolas Bernard le vendredi 20 août 2010 à 10h50

A titre préalable, je reviens sur mon observation "dès 1938, la Suisse, Etat souverain, applique une législation étrangère, antisémite, tout en contribuant à la durcir", et à laquelle vous répliquez : "Vous êtes sûr que la Suisse a appliqué une législation étrangère ? Une loi allemande était en vigueur en Suisse ? Je ne vous suis pas…".

Je l'avais pourtant écrit dans mon message, ce passage vous ayant probablement échappé : "Or, la lettre "J" sur les passeports allemands tient compte d'une définition de la notion de "Juif" telle qu'elle résulte... des lois de Nuremberg de 1935."

Histoire d'enfoncer le clou : les restrictions à l'entrée du territoire suisse découlant de cette politique, qui crée bien hypocritement un système de visa déguisé à l'encontre des ressortissants allemands classés "juifs", sont donc une pure application d'une notion juridique allemande du terme "juif" - car qui décide d'attribuer à qui la lettre "J" sur ses passeports, et en vertu de quel texte de loi ?

Je persiste et je signe : en 1938 la Suisse ferme ses frontières à des individus catégorisés par une législation allemande, celle des lois de Nuremberg. Elle applique une législation étrangère. Et antisémite.

Pour revenir sur le reste, vous écrivez : "Dans mon for intérieur et sur le plan moral, la politique du refuge de la Suisse durant la Seconde Guerre mondiale est la page la plus sombre de l’histoire récente de mon pays." Dites-vous pourtant que cette situation aurait pu empirer, dans l'hypothèse d'une victoire nazie en 1940-1941.

Vous ne l'admettez pas, cependant, mais ne le démontrez pas davantage. "Je pense que les fonctionnements démocratiques les auraient préservés", avouez-vous, et à propos des ressortissants suisses de confession juive. Ce qui, outre de se révéler utopiste, repose sur une argumentation peu solide.

Votre raisonnement, en effet, se base sur le fait que les Suisses ne sont, dans notre réalité, pas allés plus loin que la lettre "J" sur le passeport allemand et la fermeture des frontières. Vous rappelez, avec justesse d'ailleurs, qu'une telle politique traduit des considérations xénophobes, pour en conclure que jamais, jamais, jamais le Conseil fédéral n'aurait touché à un cheveu des ressortissants suisses de confession juive.

A ce titre, votre volonté d'opérer une distinction radicale et exclusive, des "questions" juives vues par Hitler et par Berne, vous conduit à minimiser, plus ou moins volontairement, l'aspect antisémite de l'affaire. L'anxiété de Berne devant les flux migratoires ? "Plus xénophobe qu’antisémite", dites-vous. Lorsque vous concédez que "la Suisse est elle-même à l’origine des mesures visant à limiter l’immigration juive", c'est aussitôt pour rappeler que lesdites mesures, souvent unilatérales, "répondaient à la pression migratoire, pas à la pression politique".

Bref, dès lors que le gouvernement suisse se serait montré bien davantage xénophobe qu'antisémite, les ressortissants juifs de confession juive n'auraient rien eu à craindre, quoi qu'il advienne en Europe. "Rassurez-vous, compatriotes israélites, il ne vous arrivera rien, nous ne nous attaquons qu'à vos coreligionnaires étrangers !"

A ce titre, vous vous fondez sur ce que le gouvernement suisse a fait, mais n'en tirez bizarrement pas les leçons qui s'imposent. Vous faites observer : "A voir aussi que durant plus de 4 ans, la Suisse était complètement encerclée par les forces de l’Axe, soit dans une position relativement proche de celle que vous décrivez, sans pour autant changer fondamentalement son attitude face aux Juifs, ni étrangers, ni suisses."

En résumé, les Juifs de Suisse, en cas de victoire allemande en 1940-1941 (et si je retiens cette hypothèse uchronique, c'est en tenant compte des plans du Führer, et non parce que cela conforterait mes affirmations, comme vous l'insinuez maladroitement), n'auraient jamais souffert de quoi que ce soit, car :

1) la Suisse est une démocratie ;
2) le gouvernement suisse était plutôt xénophobe qu'antisémite ;
3) avant et pendant la guerre, la Suisse n'est effectivement pas allée plus loin que ladite politique xénophobe.

Or, que la Suisse soit une démocratie ne l'a précisément pas empêchée de participer à l'emballement de la législation antisémite allemande, ne l'a pas empêchée de multiplier les concessions dès le mois de juin 1940, ne l'a pas empêchée de fermer ses frontières aux réfugiés juifs menacés de persécutions puis d'extermination.

Quitte à me répéter : si je mentionnais la lettre "J", c'était non pour confondre les attentes antisémites et xénophobes du gouvernement suisse et le programme génocidaire de Hitler (j'ai en effet clairement opéré cette distinction, contrairement à ce que vous tentez de faire croire), mais pour rappeler que, si un gouvernement se compromet sur un tel point à une époque où l'Allemagne ne domine pas encore l'Europe après avoir vaincu la France, la Grande-Bretagne et l'U.R.S.S., ce même gouvernement sera évidemment capable de céder sur le reste, dans l'hypothèse d'une victoire allemande en 1940-1941. Le discours de Pilet-Golaz du 25 juin 1940, lequel s'accompagne d'actes de complaisance (vous ne revenez d'ailleurs pas dessus, et j'en prends note), nourrit mon propos.

A cet égard, il n'est pas sérieux d'arguer du fait que la Suisse n'est pas allée plus loin pendant la guerre que Hitler a perdue. Vous évoquez en effet un contexte dans lequel les chances de victoire de l'Allemagne s'amenuisent de mois en mois, et dans lequel le Reich est au contraire susceptible de réviser l'ordre de ses priorités, et de donner à la Suisse une marge de manoeuvre qui va en s'élargissant.

Vous conviendrez, j'espère, que ce n'est absolument pas comparable avec l'hypothèse d'une ère de domination nazie sur le continent européen à l'issue d'une victoire allemande sur les Alliés franco-britanniques en 1940 et sur l'U.R.S.S. en 1941.

Outre d'isoler davantage la Suisse et les autres pays neutres, outre de renforcer également la prééminence politique et idéologique du Reich, une telle victoire donnerait également à Hitler la maîtrise du temps et des moyens pour préparer le terrain à une déportation généralisée des Juifs d'Europe, étape par étape, mois par mois, année par année, pays par pays, catégorie par catégorie (les étrangers d'abord, les nationaux ensuite, par exemple).

Dans cette hypothèse, il me paraît absurde - pas d'autre mot, désolé - de considérer que, sous prétexte de démocratie, le Conseil fédéral aurait tenu tête au Führer. Franchement, vous voyez les conseilles fédéraux lui proclamer, en substance : "Nous sommes démocrates et xénophobes, Monsieur le Chancelier, mais nous ne sommes pas antisémites, et le fait que vous dominiez l'Europe de l'Atlantique à l'Oural ne nous impressionne pas" ?

Le dictateur nazi, lui, et comme, mettons, pendant la crise des Sudètes mais peut-être sur un temps plus long, aurait soufflé le chaud et le froid, fait grimper les revendications, noyé la Judenfrage sous d'autres questions qui ne l'auraient en fait pas intéressé, de manière à ce que Berne capitule sur l'essentiel en croyant ne céder que l'accessoire. Le processus, je le répète, aurait peut-être pris du temps, se serait peut-être heurté à l'opinion publique suisse, mais dans un tel scénario uchronique, je le vois mal ne pas aboutir.

*** / ***

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