Ce qui est exact, c'est qu'il n'y a pas eu de pression allemande à l'origine de la politique antisémite de Vichy. Cette dernière résulte surtout d'un souhait proprement xénophobe, antisémite, et tyrannique, souhait du gouvernement de Vichy. Bref, Vichy a pratiqué ce qui lui était agréable.
Mais il n'en a pas moins cherché à joindre l'utile à l'agréable, et en ce sens, a vite perçu, grâce à l'intervention d'agents allemands bien placés - notamment Abetz (voir Barbara Lambauer, Otto Abetz et les Français, Fayard, 2001) - que non seulement l'occupant ne s'y opposerait pas, mais en outre que cette politique d'oppression et d'exclusion pouvait lui plaire. Ce qui, dans un contexte où Vichy s'attendait à une victoire allemande, pouvait se révéler à première vue très lucratif, notamment quant à la négociation d'autres dossiers (ligne de démarcation, frais d'occupation, prisonniers de guerre). D'où une politique de collaboration, qui cherchera à marchander la crapulerie. Laval n'agira pas autrement en 1942.
Il y a donc bel et bien une influence allemande, non pas sur le fond de la politique, mais sur son calendrier. C'est parce que Vichy sait, notamment grâce aux contacts Abetz-Laval, qu'il peut mettre en pratique une intolérance d'Etat (son voeu le plus cher), et que, mieux encore, cette intolérance d'Etat est de nature à servir ses intérêts vis-à-vis de négociations avec l'Allemagne, qu'il se lance rapidement dans ce programme. |