Vous écrivez : "Les volontaires francais sur le front de l'Est on beneficies apres la guerre des circonstances politiques du moment, a savoir la guerre froide."
Ils ont surtout, dans un premier temps, subi "les circonstances politiques du moment", à savoir la chasse aux collabos et les règlements de comptes inévitables (certains diront légitimes) ayant suivi la libération du sol français. Certains ont été purement et simplement liquidés, le cas le plus connu étant celui du 8 mai 1945 mais d'autres affaires du même type ont eu lieu en Allemagne et, semble-t-il, en France. Parfois, on s'en est pris aux familles.
Contrairement à ce qui est souvent dit, la justice n'a pas non plus été tendre avec les ex-LVF et WSS. De mémoire, Fenet écope de 20 ans de travaux forcés, un officier de la Sturmbrigade, ancien de 14-18, deux fois cité durant la Grande Guerre, une fois en 39-40, prend lui la perpétuité comme l'un des fusillés de Bad Reichenhall, jugé par contumace. La Mazière grâce à son "bon dossier" en prend pour 5 ans. Aucun d'eux n'avait appartenu à la Milice. Il est difficile de parler de laxisme.
Ensuite - et c'est autre chose - arrive l'amnistie qui permet en effet aux condamnés de pas trop mal s'en sortir. Certains n'ont d'ailleurs pas attendu qu'on les libère et sont partis se faire tuer en Indochine. A mon sens, l'amnistie a moins à voir avec la guerre froide qu'avec à une tendance naturelle à effacer les ardoises, passée l'émotion du moment. Il me semble que, plus tard, on fera de même avec les soldats perdus de l'OAS.
S'agissant des crimes de guerre, vous écrivez : "Au moins un crime de guerre a ete prouve a ce jour : Des soldats de la LVF en Pologne ont ete appelle pour aider des SS qui avaient affaire a des Juifs qui ne voulaient pas se laisser deporter comme ca. (...) les legionnaires francais auraient assassines plusieurs Juifs recalcitrants (60 ou 80, trou de memoire)"
En fait, le rapport auquel vous faires référence (nous présumons qu'il existe et qu'il est conforme à ce qui nous en est dit) parle de 113 victimes. Il indique : "Pendant ces deux jours, 113 Juifs furent tués dans le camp de Kruszyna et à ses alentours, lors de tentative d'évasion ou de rebellion." Sans préciser le nombre de ces victimes imputables aux Français et aux autres militaires requis pour assurer la garde des captifs : auxiliaires ukrainiens, soldats et gendarmes allemands. Il est donc inexact de dire que 60 ou 80 Juifs auraient été assassinés par des volontaires LVF. Sur ce genre de sujet, il n'est pas inutile d'être rigoureux sans quoi, dans quelques mois ou années, on parlera de centaines de morts.
Pour le moment, un certain nombre de crimes de guerre commis par des hommes de la LVF ont pu être établis (plus ou moins solidement). A ma connaissance, aucun concernant la Sturmbrigade et la Charlemagne.
Enfin, les motivations des volontaires français. C'est, à mon avis, la question la plus compliquée et il me semble qu'aucun auteur n'a réellement creusé le sujet. Oublions Mabire qui donne une vision romantique de tout cela (pour des raisons beaucoup moins idéologiques que ce qu'on prétend). Giolitto et Forbes, vous le rappelez, "s'en tiennent pratiquement a l'anticommunisme comme motivation essentielle de ces engagements". Ce qui devrait vous conduire à la réflexion suivante : Si tout le monde l'écrit, c'est peut-être parce que c'est pas totalement faux.
"Il y avait egalement des gamellards et des baroudeurs dans le nombre" ajoutez-vous. C'est certain, comme partout. Il y avait aussi des voyous, comme partout. Et, comme le rappelle F. Delpa : "Cette analyse que je trouve excellente peut être complétée par l'évocation des besoins d'aventure et de dévouement à une cause simple qu'on peut si facilement mettre en action chez les jeunes..." (à ce propos, la Mazière a écrit des choses très intéressantes).
Il y avait aussi des gens qui se sont retrouvés là et qui auraient pu se retrouver dans le camp d'en face : des requis du STO ayant fait des bêtises en Allemagne et à qui on a donné le choix entre le camp de concentration et la division Charlemagne (L'un d'eux a acquis une certaine notoriété en détruisant beaucoup de chars soviétiques), des hommes animés du seul souhait de ne pas être des "embusqués" et de se battre et qui, pour certains vont aller au plus simple (si des bureaux de recrutement FFL avaient existé, ils auraient sans doute fini à la 2e DB) ou se retrouver en uniforme feldgrau après avoir frappé à la porte de la résistance, de très jeunes gens qui s'engagent sur un coup de tête, après un coup de cafard ou une déception amoureuse... La LVF et la WSS ont joué le rôle de la Légion étrangère. Il y avait même des Juifs et des Noirs, certes peu nombreux, parmi les volontaires du front de l'Est.
La question des motivations n'est pas simple et, pour ne rien arranger, celle-ci se trouve parasitée par des considérations politiques. On ne peut l'aborder qu'en mettant de côté les à priori, positifs ou négatifs, et toute volonté de juger ou de glorifier. Combien en sont capables ?
Reste à se plonger dans les sources. Certains survivants ont livré des témoignages et se sont expliqués de leurs choix. Des livres existent. Ecrits après la guerre et dont la sincèrité est douteuse, me direz-vous. Peut-être. Alors, il y a les écrits antérieurs. De nombreux volontaires ont écrit des lettres à leurs familles depuis le front. D'autres engagés ont laissé des textes où ils livraient leur regard sur la situation politique du moment ou ont exposé celui-ci aux reporters venus les interroger. D'autres, comme La Mazière, ont écrit dans des journaux collaborationnistes. Ces textes existent. Si vous souhaitez mieux cerner les motivations des volontaires, je crois qu'il vous faut les lire.
P.S. : "l'antisemitisme qui regnait dans tous les milieux de la droite collaborationniste ne les a evidemment pas epargne" écrivez-vous. Evidemment. L'antisémitisme n'était d'ailleurs pas circonscrit aux "milieux de la droite collaborationnsite". Le gauche collaborationniste aussi en souffrait et parfois même la droite résistante. Mais c'est un autre sujet. |