Bonjour - bonsoir,
Laurence Brisset dans "La NRF de Paulhan" qu'elle vient tout juste de publier chez Gallimard résume bien le rôle central de l'éminence grise de la célèbre revue :
" C'est pendant la guerre que la position stratégique de PAULHAN se révèle dans toute son évidence : son réseau unique de relations le rend incontournable. Lui seul sait où se trouvent la plupart des écrivains; il est à même de transmettre ou de recevoir messages et manuscrits. C'est ainsi qu'il devient le directeur littéraire des Editions de Minuit. Toutes les revues qui se créent, dans l'ombre ou dans une lumière trouble, lui doivent quelque chose : un manuscrit, une adresse, un conseil ou une perfidie...
Paulhan est, avec ARAGON, le grand intercesseur de la résistance littéraire, et plus exactement poétique.
Dès 1939, il avait senti ce renouveau poétique : " Jamais plus qu'aujourd'hui, la parole n'a été la poésie. Les autres (révolutionnaires tout particulièrement) terriblement fonctionnaires." Paulhan a d'abord encouragé la revue P.C.39 (note : P.C. pour "poètes casqués"), puis P.C. 40, devenue ensuite Poésie 40, 41, 42, 43, 44 et 45... Pierre SEGHERS, jeune poète encore inconnu à l'époque, dirige à Nîmes, où il est mobilisé, cette publication confidentielle dédiée à Apollinaire et à Péguy. (...) Paulhan, comme Aragon, Max Jacob, Jules Romains, Gaston Gallimard et bien d'autres, s'y est tout de suite abonné et lui a transmis, entre autres des inédits d'Appolinaire. (Note : belle preuve d'une reconnaissance sincère du talent du jeune Seghers !) Seghers va publier dans sa revue Aragon, Eluard, Ponge, Michaux mais aussi Pierre Emmanuel et Loÿs Masson.".
(p.199 - 200)
Jean Paulhan soutint aussi dès ses débuts à l'été 1941 (juillet) la revue "Confluences" que René TAVERNIER édite à Lyon, en zone Sud.
Laurence Brisset affirme que la revue de Tavernier ressemblait à la NRF de Paulhan (d'avant-guerre) par sa diversité. Elle proposait aussi des textes non-poétiques.
On mentionnera ici que Paulhan avait été forcé de laisser la direction littéraire de la Nouvelle Revue Française à l'ami-ennemi Pierre DRIEU (La Rochelle), une direction artistique que les positions de l'auteur de "Gilles" ouvertement fascistes puis nazies lui permirent d'obtenir auprès de Gaston Gallimard.
Drieu fut en fait imposé par Abetz à la tête d'une revue qui était aux yeux des nazis un contre-pouvoir intellectuel en France.
Cordialement,
René Claude |