Bonsoir,
Fin septembre 1939, Otto Strasser s'est réfugié à Paris où il put continuer tant bien que mal à écrire et à vivre, grâce à Georges Mandel, alors ministre de l'Intérieur.
Extrait d'une conversation entre les deux hommes :
Mandel me dit :
- Hitler va-t-il attaquer la France, oui ou non ?
Je n'hésitai pas :
- Vous avez eu tort de ne pas attaquer l'Allemagne au moment où celle-ci était engagée en Pologne. Maintenant, qui sait ce qui va se passer ?
Mandel se versa un verre de champagne, le but à petites gorgées et me demanda :
- Quel pourcentage de chances y a-t-il selon vous à une attaque allemande ?
- Le pourcentage, vous pouvez le calculer mieux que moi. Mais ma conviction est que Hitler attaquera certainement.
Je lui racontai alors mes innombrables conversations avec Hitler, dans lesquelles il avait toujours manifesté sa haine contre la France et les Français qu'il traitait de "bâtards" incapables d'avoir une force militaire de quelque valeur.
Mandel m'écouta avec une grande attention, sans m'interrompre.
J'ajoutai que Hitler comptait, après avoir vaincu la France, faire un dernier effort pour s'entendre avec l'Angleterre.
Mandel secoua la tête d'un air irrité :
- Ceci prouve une fois de plus que les Allemands n'ont rien compris à la politique anglo-saxonne. Vous m'entendez, jamais il n'y aura d'entente entre l'Allemagne et l'Angleterre. Les Anglais n'ont qu'une parole et quand ils la donnent, ils la tiennent. Hitler est un fou s'il croit le contraire. Vous avez bien vu que l'Angleterre a tenu parole dans la crise polonaise; si la France devait tomber, le bouledogue anglais ne lâcherait pas. Alors l'Amérique entrerait en jeu et l'Allemagne finirait par se trouver devant un nouveau Versailles.
Bien cordialement,
Francis. |