Bonsoir,

En janvier 2004, le n° 43 de la revue "Histoire de Guerre" - de la belle époque lorsque Jean-Robert Gorce en était le rédacteur en chef - proposait une étude de 22 pages sur la recherche nucléaire sous le IIIe Reich.
Le résumé de ce dossier très technique dépasse mes capacités à le résumer. Contentons-nous des conclusions des auteurs :

Nous arrivons au terme de cette difficile ana­lyse de faits très complexes.
La bombe atomique allemande: mythe ou réalité ? Ni l'un ni l'autre. Comme bien souvent, la réalité se situe quelque part entre les deux. Par-delà l'imagination à laquelle certains ont laissé libre court, l' étude objective démontre que la recherche nucléaire allemande ne fut pas aussi "pitoyable" qu'a bien voulu le dire Vanevar Bush. En particulier, elle a réussi à concevoir et développer, grâce à Paul Harteck, une technique d'enrichissement, l'ultracentrifugation, dont on connaît le brillant et surprenant avenir.
Qu'a-t-il donc manqué à la recherche alle­mande?
Un catalyseur qui aurait puissamment motivé les scientifiques et enclenché une décision du pouvoir politique. C'est précisément ce cataly­seur qui n'a pas fait défaut aux Américains dans la conception et la réalisation du projet Manhat­tan. Quel était donc ce puissant catalyseur: la connaissance - même erronée - des plans de l'adversaire. Nous nous rangeons donc tout à fait aux propos de Michael Neufeld qui, dans un livre de référence consacré au programme des fusées A4/V2, a observé que les Alliés et les Allemands se livrèrent à une course effrénée pour le contrôle de la fusée et de l'atome sans jamais se rencontrer. Cette double course contre un concurrent imaginaire devait aboutir en moins de trois mois, du 3 octobre au 24 décembre 1942, à la naissance d'un monde nouveau dominé par l'espace et l'atome.
Mais qu'aurait été la réaction des scientifiques allemands devant une décision éventuelle de fabriquer la "bombe atomique" ?
- Certains auraient très vraisemblablement hésité, ou même refusé, de donner la bombe, l'arme absolue, à Hitler.
- D'autres n'auraient-ils pas estimé que leur devoir était de la donner à leur pays ? Tous n'au­raient-ils pas été tentés d'aller plus loin, de voir ce qu'il y avait après ?
Toutes ces questions resteront sans réponse. C'est pourquoi tous exprimèrent leur soulage­ment de n'avoir pas eu à choisir.

Bien cordialement,
Francis.