Bonne question.
Il me semble que l'Histoire n'est plus un domaine réservé aux seuls mandarins titrés et rémunérés. Vous êtes vous-même un exemple encourageant d'une passionnée qui s'est faite historienne-biographe pour écrire la vie et de l'engagement de votre papa.(*)
Il me semble que la passion, l'honnêteté et la rigueur sont les exigences essentielles pour écrire l'Histoire. Persuadé depuis longtemps que l'objectivité est une chimère destinée aux apprentis journalistes - et encore ! - je ne la retiens pas dans les exigences. Reste alors la conscience de sa subjectivité maîtrisée. C'est déjà beaucoup ! J'ajouterai encore une chose : il est nécessaire d'être conscient de ses limites à l'intérieur d'une discipline qui n'est pas une science exacte.
Daniel Cordier est sans doute le plus connu des amateurs passionnés devenus historien(ne)s reconnu(e)s. Mais il y a d'autres exemples : une Dominique Lorentz qui a enquêté à fond sur l'histoire des relations atomiques françaises avec Israël et les pays arabe est devenue une historienne. Quand la fille de Berty Albrecht écrit des ouvrages sur sa mère, elle devient aussi une biographe-historienne. Etc.
Bien cordialement,
RC
(*) Internet a boosté le phénomène, même si on doit rester vigilants quant aux dérives possibles. Mais c'est justement l'absence de contrôle hiérarchique, étatique, politique qui a fait du ouèbe sa force. Il doit rester libre de toute censure. Ce sont les internautes qu'il faut informer et... éduquer. Les coups de ciseaux sont contre-productifs, on le sait, l'histoire des lettres est pleine de procès, de censures et d'autodafés iméciles et dangereux. Mais c'est un autre sujet.
(**) Je lis régulièrement dans des éditos et articles de la presse romande le mot "objectivité" employé comme synonyme de "neutralité". Il est revendiqué par des rédacteurs et des journalistes sans style propre, ou plutôt au ton réglementairement plat ou aplati car tout imprégné des codes de la navrante novlangue de plus en plus exigée par les gros médias et enseignée dans les cours de journalisme à Lausanne. On ne parvient plus à discerner les auteurs des papiers : c'est d'ailleurs le but recherché sous couvert d'efficacité et ... d'objectivité. Cette tendance est également dominante dans le langage des mandarins universitaires romands. Outre l'ennui qui émane des papiers et communications, j'y vois poindre le risque d'un nivellement objectiviste qui bannira les personnalités jugées trop fortes, trop marquées et leur "petite musique", leur style. (Je pense à un Christophe Gallaz, franc-tireur brillant de la presse romande.) |