L'entrevue narrée par Mengin - Les origines de la discorde - forum "Livres de guerre"
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Les origines de la discorde / Dorothy Shipley Whyte

En réponse à -4 -3 -2
-1Une réponse de Cassin à Mengin de Laurent Laloup

L'entrevue narrée par Mengin de Francis Deleu le samedi 31 décembre 2005 à 15h42

Bonjour Laurent, bonjour à tou(tes),

Renouons avec nos bonnes vieilles habitudes de comparaison de textes ou de relation d'un évènement vu par chacun des protagonistes.
Robert Mengin narre - non sans humour ou ironie - son entretien avec le professeur Cassin. Pour en apprécier toute la saveur : la relation in extenso (sauf les interlignes pour éclaircir le texte)

****************

Introduit devant l'éminent professeur, je suis intimidé. En présence du Grand Prêtre. Je l'imagine portant la robe de Mardochée ou de Joad. Mais alors, il l'eût déchirée en me parlant de mon crime. Après m'en avoir montré l'hor­reur, il me dit qu'il ne s'agissait peut-être après tout que d'une erreur juvénile. Il me convia à la réparer dans la joie du pardon et de la foi recouvrée. La classe de troi­sième et les matinées de la Comédie Française me remon­taient au cerveau :

Jurez donc, avant tout, sur cet auguste livre
A ce roi que le ciel vous redonne aujourd'hui,
De vivre, de combattre, et de mourir pour lui.

Je voulus argumenter sur le point de droit. Je tombais bien! M. René Cassin est professeur de Droit civil. Il eut la bonté de me faire un cours. Je ne saurais le répéter ici, je n'y compris rien. Je revins à l'exemple concret qui m'était venu à l'esprit dès la lecture de l'Acte d'Engage­ment :

- Enfin, Monsieur, si je refuse d'obéir à un ordre du Général, je suis bien du même coup, parjure, insoumis ...

Le professeur Cassin leva les bras au ciel.

- Mais pourquoi, diable, n'obéiriez-vous pas aux ordres du Général ?

Avec tout le respect que je dois au professeur, je prends la liberté de lui faire remarquer que ce n'est pas la réponse à la question posée. Alors, avec patience, avec bonté, il reprend le cours de Droit. Quand il le termine, sans que j'aie, cette fois encore, rien compris qui soit de nature à me convaincre, il me dit :
- Et maintenant, mon petit, j'ai beaucoup de travail. Vous voilà rassuré, allez vite signer.
- Mais je ne suis pas du tout rassuré, Monsieur! Je n'ai pas saisi votre raisonnement. Il me semble toujours...
- Eh! bien ( dit-il en perdant finalement patience) , il me semble à moi qu'il faut que vous saisissiez ceci: je n'ai pas de temps à perdre sur le cas particulier d'un offi­cier subalterne qui fait des embarras.

Ce ton irrité me met plus à l'aise que la mansuétude dont le professeur avait jusqu'alors fait preuve, et je lui pose une question personnelle :
- Cette formule de l'Acte d'Engagement, l'approuvez­ vous, Monsieur? Est-ce vous, Monsieur, qui l'avez rédigée? Loin de se fâcher, le professeur lève alors non plus les deux bras, mais un seul, en un geste apaisant, et après un silence, me dit à peu près ce qui suit : quand la maison brûle, on ne regarde pas si les pompiers emploient de l'eau filtrée pour éteindre l'incendie; on s'est trouvé devant un cas urgent, on a fait pour le mieux. Il ne faut pas attacher de l'importance à ce qui n'en a pas.
- Très bien, dis-je, si cela n'a pas d'importance, je ne signerai pas.
- Mais je n'ai pas dit cela! La manière dont est rédigé l'Engagement n'a pas l'importance que vous lui attribuez. Mais ce qui est important, c'est de faire comme tout le monde! Est-il entêté!

Au lieu de m'éconduire purement et simplement, le professeur ajoute, avec un bon sourire, en me congédiant :
- La nuit porte conseil. Vous êtes jeune, vous vous êtes échauffé. Allez réfléchir calmement. Revenez me trouver demain. Nous arrangerons cela et vous resterez l'un des nôtres, je suis sûr.

Je réfléchis en effet et, le lendemain, je revins plein d'espoir.
- Je signerai, dis-je, mais en faisant précéder ma signa­ture de la formule qui est celle de l'armée de mer, et qui est énoncée lors des prises de commandement. On s'engage à obéir non pas à n'importe quel ordre, mais à tout ce qui vous est commandé « pour le bien du service et le succès des armes de la France ». Cette formule si belle est limi­tative : si, en conscience, on estime qu'on doit désobéir à un ordre parce qu'il n'a pas été donné « pour le bien du service et le succès des armes de la France », on risque d'être mis aux fers, certes, on risque d'être fusillé, mais on n'est pas parjure. On demeure libre en conscience. Permettez donc...

Le professeur Cassin ne me laisse pas terminer. J'ai devant moi un autre homme que la veille. Pourquoi ? Je ne peux que l'imaginer, et je ne le sais pas d'une manière assez sûre pour l'avancer ici. Glacial, il me dit :
- Il faut signer le même Acte d'Engagement que vos camarades sans ajouter ni retrancher un mot; ou bien il faut nous quitter.

Sur la console, je repris ma casquette à coiffe blanche, et je quittai Carlton Gardens. C'était le 20 septembre 1940.
************

Je vais me résoudre à déposer le livre de Mengin ... l'année prochaine pour commencer l'année en beauté §:-))

En attendant, mes meilleurs voeux de bonne et heureuse année à toutes et à tous.

Bien cordialement,
Francis.

*** / ***

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 bidouillé par Jacques Ghémard le 1 1 1970  Hébergé par PHP-Net PHP-Net  Temps entre début et fin du script : 0.01 s  5 requêtes