Le déclenchement de la guerre d'Indochine - Histoire du Viêt-Nam - forum "Livres de guerre"
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La description du livre

Histoire du Viêt-Nam / Philippe Devillers

En réponse à
-1d'une drole de situation... de Laurent Boussaton

Le déclenchement de la guerre d'Indochine de Serge Desbois le samedi 30 avril 2005 à 16h01

Cher Laurent
Philippe Devillers a complété ce 1er livre par un second paru en 1988 : “ Paris, Saigon, Hanoï , les archives de la guerre d’Indochine 1944 / 1947 ”.

Dans la genèse de cette guerre, nous Français et Viets sommes tous coupables. Ces causes ont souvent été analysées depuis 50 ans et des livres comme ceux de Devillers entre autres nous ont permis d’y voir plus clair.

Dans les années 1945 et suivantes, la plupart des Français se désintéressaient des colonies françaises et en particulier de l’Indochine, préoccupés qu’ils étaient par les conséquences de la guerre : restrictions alimentaires jusqu’en 48/49, problèmes insolubles de logement surtout dans les villes bombardées etc. Ils reprenaient une vie ordinaire à l’endroit où ils l‘avaient laissée en 1940,
sans se rendre compte combien le monde avait été bouleversé par le brassage de cette 2ème guerre mondiale ; dans les écoles y était enseignée l’œuvre coloniale magnifique de la France.

Très peu de Français anesthésiés par ces 5 années d’isolement avaient entendu parler de la décolonisation et pourtant le nouveau maître du Monde Roosevelt en faisait sa litanie journalière. À l’occasion de la conférence de Casablanca en 1943, lors d’un long entretien avec le sultan du Maroc, il lui avait fait miroiter que bientôt, lorsque les Français auraient quitté son pays, les USA l’aideraient à mettre en valeur les richesses de son sol... *

De Gaulle lui-même n’inscrivait pas le problème colonial dans ses préoccupations principales. Il avait son penchant pour l’Afrique Équatoriale Française qui avait rallié précocement la France Libre. Manifestement l’Indochine, il ne connaissait pas. Il y avait à l’époque 2 corps d’officiers, d’une part ceux de l’Armée Métro dont le stationnement descendait jusqu’à Tamanrasset englobant les 3 pays d’Afrique du Nord et d’autre part la “ Colo” qui elle s’égrainait dans le reste de l’Empire. De Gaulle, comme auparavant Pétain et Foch de l’Armée Métro, avait les yeux tournés vers l’Europe, le Rhin et la ligne bleue des Vosges. Ceux ci ne s’intéressaient que peu ou pas aux pays du sud et aux colonies qu’ils ne connaissaient pas.

En août 1944, De Gaulle nomma le général Mordant présent à cette date en Indochine isolée de la métropole, chef de la résistance contre les Japonais. Des armes furent parachutées au Tonkin, ce qui ne passa pas inaperçu au Kampetaï (gestapo japonaise). Les Japonais préoccupés de voir leur retraite de la Malaisie coupée, déclenchèrent le coup du 9 mars 1945 après lequel toute présence française administrative et militaire en Indo avait cessé d’exister.

Nous avions perdu la face pour la 2ème ou 3ème fois depuis 1940 auprès de la population vietnamienne et cette fois-ci de façon rédhibitoire, ce qui est grave du point de vue asiatique. Nous étions tout simplement éliminés de l’Indochine physiquement et moralement.

Après la capitulation du Japon, De Gaulle avait choisi comme Haut-Commissaire en Indo, l’amiral Thierry d’Argenlieu et ne lui avait donné qu’une instruction courte d’ordre général ** : “ Rétablir la souveraineté française en Indochine”. Il s’en tenait donc à la déclaration du gouvernement du 24 mars 1945 : “La fédération indochinoise et les autres parties de la communauté formeront l’Union française…l’Indochine aura un gouvernement présidé par le gouverneur général…” Ce qui était très loin de ce qu’attendaient les Viets : l’indépendance qui implique la maîtrise de son pays tant en ce qui concerne les affaires étrangères que la politique intérieure avec un chef de gouvernement choisi par eux-même.

Lorsque De Gaulle a quitté le pouvoir en janvier 1946, l’amiral est remonté sur Paris pour venir chercher de nouvelles directives. Il a bien fait les choses puisque le 22 févier 1946 il a même rencontré le chef des communistes, Maurice Thorez, ministre d’État **. Celui ci lui a dit : “ Amiral, étant donné le parti auquel j’appartiens, je souhaite naturellement que tout se règle au mieux avec le Viet Minh mais nos couleurs avant tout ! Et donc s’il faut cogner, cognez et cognez dur ”. C’était avant la guerre froide qui devait débuter un an plus tard. Aussi surprenant que soit ce témoignage, nous n’avons pas de raison de mettre en doute ici la parole de l’amiral.

Quant au président provisoire qui avait remplacé De Gaulle, Félix Gouin socialiste, il lui a dit que, ne connaissant rien au problème indochinois, il le renvoyait sur son ministre de la France d’outre-mer Marius Moutet qui avait été ministre des colonies du gouvernement du Front Populaire en 1936 ” **. Or Marius Moutet était justement en train de préparer le voyage en sens inverse pour essayer de voir ce qui se passait exactement dans ce territoire lointain.

Remarquons au passage que celui-ci aurait pu avoir un contact amical avec Ho Chi Minh car ils s’étaient trouvés ensemble au congrès de Tours en 1920.
Des retrouvailles étaient possibles pour discuter d’une sortie d’affrontement.

Nous étions coupables aussi de nous être laissés leurrés par les mêmes politiciens et les anciens partis d’avant 1940 qui nous rééditèrent une constitution de la 4ème république, clone de celle de la 3ème, après nous avoir fait rejeter le projet de De Gaulle et le départ de celui-ci en janvier 1946.

Conséquence, comme avant 1940, des gouvernements qui se succèdent au gré du vent et des recombinaisons politiques. 23 ministères en 13 ans. Pas de ligne directrice en ce qui concerne la politique coloniale. Des hauts fonctionnaires en mission outre-mer livrés à eux-même ou bien tournant comme des girouettes suivant la couleur du ministre.

En mai 1946, D’Argenlieu se trouve au centre d’un imbroglio en ce qui concerne le sort de la Cochinchine, capitale Saigon. De Paris émanent des contradictions. Il y en a qui souhaiteraient disjoindre du reste du pays ce territoire qui avait le statut de colonie depuis 1863 par opposition à l’Annam et au Tonkin capital Hanoï, protectorat depuis 1885. Des vietnamiens du conseil consultatif de la Cochinchine à Saigon demandent que soit constitué le gouvernement provisoire de la République cochinchinoise. Du moins ce sont les notes de D’Argenlieu qui le disent. Et le 1er juin 1946, D’Argenlieu reconnaît le gouvernement provisoire de la République cochinchinoise, le jour où Ho Chi Minh est dans l’avion qui l’emmène à la conférence de Fontainebleau pour justement y discuter du sort de l’Indochine.

C’est un Casus belli pour les Viets qui ne concevaient pas l’indépendance sans l’union des 3 Ky (territoires) : Cochinchine, Annam, Tonkin. En effet la Cochinchine était le grenier à riz du Tonkin très peuplé et après la désorganisation engendrée par le coup de force japonais du 9 mars 1945 et la guerre du Pacifique, les échanges entre le Sud et le Nord avaient été interrompus. Le train Saigon-Hanoï via Nathrang ne fonctionnait plus de même que la voie maritime Saigon Haïphong. La famine tua des milliers de Tonkinois, ce dont furent accusés les Français comme d’habitude alors que l’administration française n’existait plus.

Le 1er chef militaire, Leclerc s’est vite aperçu qu’il n’était pas possible de tenir avec quelques milliers d’hommes, un pays grand comme 2/3 de la France peuplé de plus de 20 millions d’habitants. La seule issue devait donc être politique. Le 18 février 1946, alors que D’Argenlieu est à Paris, il adresse ce télégramme à l’État-Major de la Défense nationale pour être transmis au général Juin et à l’amiral: “ Derniers renseignements Hanoï confirment Annamites de plus en plus prêts soit céder, si reçoivent satisfaction mot indépendance, soit se rejeter dans guerre du type résistance française qui peut durer plusieurs années…moment opportun pour déclaration gouvernementale précise et renfermant le mot indépendance ”.

Réactions de l’amiral à Paris auprès de Juin : “ Je remercie Juin d’avoir si opportunément réservé la diffusion de ce communiqué singulier…le mieux est de taire à tous égards…cette opinion individuelle de Leclerc hâtivement émise…Juin est pleinement d’accord ”.

De toute façon, quelles que furent les intentions profondes de D’Argenlieu ***, il y avait dissension entre le Haut-Commissaire et Leclerc. Leclerc devait s’effacer. Ce qui ne pouvait pas faire avancer la solution.

Les autres généraux en chef qui se sont succédés jusqu’à De Lattre n’ont jamais été à la hauteur de la situation et ont été incapables d’imposer une doctrine au Haut-Commissaire auquel ils se soumettaient passivement en attente d’une étoile supplémentaire qu’ils ont obtenue d’ailleurs ****.

Ainsi s’organisa de mois en mois l’enlisement dans l’indécision générale qui s’aggrava d’années en années.
Le meilleur exemple de cet immobilisme fut la prise de décision d’évacuer Cao Bang et le désastre militaire qui s’en est suivi : en juin 1949 enfin, un des gouvernements éphémères, moins indifférent que les autres à l’Indochine, décide d’envoyer le général Revers, chef d’État-Major, inspecter en Indo et lui demande de faire des propositions pour la solution du conflit. Ce rapport confirmait ce que Leclerc avait déjà présagé 3 ans plus tôt : Le corps expéditionnaire qui pourtant n’avait fait qu’une reconquête partielle de la rive gauche du Fleuve Rouge en octobre 1947, occupait une portion de territoire trop importante par rapport à ses moyens. Il demandait que soient abandonnés Cao bang et une grande partie de la route coloniale N° 4 longeant la frontière de Chine. À la suite d’atermoiements divers et de scandales politico-militaires
( affaire des fuites, affaire des généraux ), rien n’était fait 1 an et demi après, en mai 1950 lorsque le Vietminh a mis en route son plan de la “ bataille des frontières” avec l’aide des Communistes chinois.

Chez les Viets, il n’y avait que des faucons et de fausses colombes. Le chef de file des premiers était le général Giap trempé de l’histoire de la révolution française, pour qui un pays ne peut acquérir sa souveraineté et son indépendance que par la révolution et la guerre dans la violence, le sang et les larmes. Les dés étaient pipés au départ par l’idéologie communiste. Les chefs viets voulaient en découdre de toute façon pour pouvoir souder leurs citoyens et leurs imposer dans la foulée le régime communiste. Il était donc difficile aux Français de s’en tirer…même s’ils n’avaient pas eu des actions provocatrices mettant gravement en cause leur responsabilité dans le déclenchement de la guerre comme le bombardement de Haïphong et la proclamation de l’Indépendance de la Cochinchine où ils avaient repris pied à cette date depuis septembre 45.

Fausses colombes. Ho chi Minh, charmant ascète aux allures de vénérable vieillard, n’oublie jamais de demander aux représentants français, des nouvelles de leurs enfants, mais au balcon du théâtre de Hanoï, il exhorte la foule à en découdre avec les Français. Fin 1945 et début 1946, 30 civils français à Hanoï sont assassinés. Autant sont enlevés et disparaissent à jamais. Devions-nous rester passifs sans essayer d’intervenir au Tonkin pour préserver nos ressortissants ?

L’engrenage de l’affrontement ainsi forgé, il sera pratiquement impossible de quitter honorablement l’Indochine à partir du jour où le corps expéditionnaire français avait mis le pied dans ce bourbier asiatique, en septembre 1945.

* “ Mon père a dit ” de Éliott Roosevelt. Flammarion 1947

** “ Chronique d’Indochine” Amiral Thierry d’Argenlieu. Albin Michel. pages 30 et 31, 168, 154, 155. Cet ouvrage paru en 1988 n’est rédigé de la main de l’amiral que jusqu’à la page 252 (sur 467), la mort l’ayant empêché d’y mettre un terme. La suite est composée de son journal régulièrement tenu.

***


**** Le général Carpentier après le désastre de la route coloniale N° 4 en octobre 1950 où furent tués ou portés disparus 5000 soldats de l’Union française à l’occasion de l’évacuation de Cao Bang, a reçu un poste important à l’OTAN.

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