Bonjour,
Dans son essai La Libération inconnue - à chacun sa Résistance, Maurice Rajsfus passe en revue les résistances.
Concernant les réactions face à l'instauration du Service du Travail Obligatoire (loi du 4 septembre 1942), il rappelle la position de ceux de
Témoignage Chrétien qui entouraient André Mandouze. Ce jeune professeur, marginal du catholicisme français, eut affaire à la censure de Vichy en exprimant dans "Les Cahiers de notre jeunesse" une condamnation du STO. Ce périodique fut interdit. Contrairement aux militants de la JOC qui affirmaient qu'il fallait accompagner les travailleurs requis en Allemagne pour ne pas se séparer des masses, André Mandouze dénonça le STO. Dans ce refus, ila été précédé par des initiateurs du "Courrier du Témoignage chrétien" : les jésuites Chaillet et De Lubac, qui estiment qu'il faut tout tenter pour empêcher le départ en Allemagne de jeunes Français.
Mandouze et ses amis légitimaient leur refus en s'appuyant sur une position officielle de Radio-Vatican qui, alors qu'est publiée la loi sur le STO, diffuse en français une déclaration n'ayant, semble-t-il pas touché la majorité de l'épiscopat de ce pays : "L'Eglise n'accepte pas les régimes bâtis sur le travail forcé, ni sur le déracinement des populations, ni sur les déportations collectives ou individuelles, sur l'exportation des peuples, sur la dispersion des familles.
Comme le souligne Maurice Rajsfus, on ne lit aucune amiguïté dans la déclaration du Vatican.
En revendiquant cette position, André Mandouze et ses camarades se trouvent en porte-à-faux avec la hiérarchie catholique française, laquelle incite ses jeunes prêtres à partir comme aumôniers avec les travailleurs requis pour le STO. (p.86-87)
Des militants de Témoignage chrétien refusèrent de partir en aidant les autres réfractaires.
Si Maurice Rajsfus doute un peu de la résistance réelle en Allemagne des membres des JOC ("S'agissait-il d'une forme de résistance ? Difficile de l'affirmer."), en revanche, l'engagement des militants de Témoignage chrétien les mena à des actes d'une authentique Résistance.
Il ajoute que cet engagement est très éloigné de la réflexion des cardinaux et archevêques de la zone occupée qui, lors de leur réunion des 20 et 21 janvier 1943, se gardent bien d'aborder ce problème alors que de nombreux jeunes sont déjà partis pour l'Allemagne. Il en va de même en zone sud, en avril 1943, lorsque les hiérarques de l'Eglise, réunis pour la première fois depuis la défaite de juin 1940, évitent eux aussi de condamner le STO mais, rappelle Renée Bédarida, ne font que constater "l'épreuve qui frappe le pays". Pour les prélats, pétainistes déclarés dans leur grande majorité, les travailleurs chrétiens "sont soumis à une contrainte... qui ne constitue pas pour eux une obligation de conscience." (p. 87)
Bien cordialement,
RC |