Au milieu des années 60,
Roger Stéphane mettait un chantier un projet très ambitieux qui apparaît aujourd'hui fondamental pour l'Histoire contemporaine et celle du gaullisme de guerre :
Enregistrer au cours de longues heures d'entretiens les témoignage des nombreux Français libres alors survivants qui s'étaient illustrés sur les différents champs de bataille et dans la France occupée. Stéphane voulait conserver pour l'avenir les mots et les expressions de ceux qui s'étaient engagés dès l'été 40 à Londres, en Afrique et dans le Pacifique. Charles de Gaulle, alors à l'Elysée, fut intéressé par l'aventure; il visionna durant trois soirées le matériau brut tourné par Stéphane. Curieusement, les choses en restèrent là... durant 20 ans.
Quelques temps avant son suicide, Stéphane confiait les bandes à Daniel Rondeau, un écrivain, afin qu'il termine le travail de manière à présenter une version exploitable au public. Mission accomplie avec l'appui de Patrick de Carolis, puisque nous pouvons aujourd'hui visionner les quatre heures d'entretiens montés sur les deux DVD diffusés par les éditions Montparnasse.
Sans mise en scène ajoutée ni reconstitution prétentieuse ou pataude, les deux auteurs de ce montage définitif ont opté pour la sobriété respectueuse qui sied le mieux aux témoignages de ces
hommes libres et de certains de leurs alliés qui furent aussi leurs complices, comme Antony Eden.
Nostalgiques, ironiques, enjoués (l'humour communicatif de Roger Barberot fait merveille), élégants, passionnés, voyous, dandys, ou déséspérés, tous (re)dirent à Roger Stéphane il y a quarante ans l'extraordinaire AVENTURE politique, militaire, mais avant tout humaine que fut leur engagement dans la France libre. Et chez tous, le spectateur décèle cette "cassure intime" que mentionne Marc Benamou, disant d'elle qu'elle est le signe distinctif de ces hommes venus de tous les horizons et issus de toutes la classes d'un société bouleversée par la défaite, l'armistice, l'occupation nazie et la collaboration de Vichy.
Un coffret incontournable.
Bien cordialement,
RC