Merci aux différents intervenants pour ces précisions sur l'incontestable politique antisémite de Vichy (et de Pétain lui même -voire ses annotations manuscrites accablantes sur certains documents juridiques) et sur ses limites réelles (et les négociations qui ont suivi l'infamant accord Oberg-Bousquet) qui ont été plaidées avec force détails et preuves par Me Jacques Baraduc, Albert Naud et Yves-Frédéric Jaffré lors du procès de Laval.
Monsieur Paxton, par contre, fait une assimilation qu'hélas reprennent les médias et les historiens paresseux entre un Vichy collaborationniste et l'opinion majoritairement anti-allemande de la population française.
Le film documentaire "Vichy la mémoire empoisonnée" souligne bien l'aspect anti-sémite de Vichy qui fait honte à notre histoire mais, contrairement aux manipulations par des historiens européens suivant la thèse de monsieur Paxton, qui nous est infligée, cela ne fait pas de la population française une population collaborationiste ou majoritairement anti-sémite. Le rapport fourni par Allen Dulles sur le moral de la population française, que j'ai rappelée dans mon dernier post, le démontre. Si je suis naturellement révolté par la politique anti-sémite (même réduite) de Vichy, je m'insurge contre l'assimilation que fait monsieur Paxton en donnant pour titre à son ouvrage La France de Vichy. S'il avait été honnête il aurait relevé le coup d'état initial de Vichy et n'y aurait pas assimilé "la France"
De fait le gouvernement américain ne l'était pas moins et jusqu'à décembre 1942, l'amiral Leahy, ambassadeur américain arrivé en France le 3 janvier 1941, a soutenu sans protester (à ma connaissance) le gouvernement de Vichy contre le général de Gaulle et va soutenir le général Giraud à Casablanca contre de Gaulle. Or après l'accord de Casablanca, le général Giraud, soutenu par Robert Murphy (représentant personnel du président Roosevelt) va appliquer à Alger les lois anti-sémites de Vichy (notamment contre certains français juifs à l'origine de l'arrestation de Laval et de son ralliement à Torch). Pourquoi nos historiens européens ne relèvent ils pas, en réponse à monsieur Paxton, le contenu de l'ouvrage de William L. Langer Our Vichy Gamble? Pourquoi ne rappelle t il pas que Jack Kennedy, Henry Ford, Prescott Bush, John Foster Dulles avaient participé à faire financer le réarmement de l'Allemagne au moment où celle ci prétendait ne pouvoir payer les réparations pour l'industrie et l'emploi dans les régions françaises ravagées par la tentative meurtrière de de 14-18 (retardant également de ce fait le financement de la défense en France et en Angleterre)
Donc condamnons naturellement les horreurs de la Shoha et la participation (même limitée) de Vichy, mais sans pour autant auto-flageller les français comme si anti-sémitisme étatique signifiait collaborationisme de la population française... (mon père a passé trois ans à Buchenwald puis Flossenburg puis Mauthausen-Ebensee et son frère aîné 8 mois à Dachau pour avoir résisté à cette politique de Vichy en organisant des passages et relais par la population française pour l'évasion de pilotes alliés abattus et, plus souvent (les besoins étant plus fréquents) pour les familles juives en fuite: ils n'avaient eu aucun mal à recruter des familles françaises pour ces nombreuses salvatrices "étapes" jusqu'en Espagne et/ou au Portugal)
La diffusion complaisante par des historiens français de l'analyse généralisatrice de monsieur Paxton sur le collaborationisme de la population française ne me semble pas indépendante du fait que François Mitterand, participant au gouvernement Laval en se chargeant du Commissariat au reclassement des prisonniers de guerre, se trouvait impliqué (accessoirement mais de façon proche) au centre du marchandage infâme sur la vie de "Juifs étrangers" (qui fut effectivement débordé sur certains juifs français, mais une vie n'est elle pas une vie quelle qu'en soit la religion, la nationalité ou la couleur), et qu'il ait caché et protégé le préfet Bousquet pendant toute la période d'après guerre jusqu'à ce que ce sombre personnage soit opportunément abattu avant de pouvoir s'exprimer devant un tribunal... Quelles révélations François Mitterand tenait il à garder cachées? Les journalistes de gauche qui emboîtent le pas de monsieur Paxton auraient ils quelques arrière pensées ou motivations pour noyer dans une masse indistincte la collaboration de notre ex-président, ancien camelot du roi dans sa jeunesse, avant qu'il ne tourne sa veste pour la résistance au nom de la lutte contre le STO (également au cœur de ce sinistre et funeste marchandage humain) et ne vole au secours de la victoire.
Par ailleurs je m'insurge contre la suggestion de certains d'écarter des informations factuelles établies ou analyses cohérentes au titre que leur auteur (pour ou contre telle ou telle thèse) n'aurait pas le titre officiel d' "historien". Au nom de quoi, la vérité aurait elle besoin que l'on ait suivi pendant 3 ou 4 ans tel ou tel cours universitaire de la pensée unique, que l'on soit détenteur d'une carte, bénéficiaire d'un statut, ou que l'on fasse partie d'une charte bénéficiant d'un tampon officiel...? |