A travers ce que dit votre réponse et les terrains qu'elle néglige, j'ai l'impression que le reproche que je vous faisais il y a quelques jours, de considérer que dès les années 50 on avait correctement compris le nazisme, n'a pas retenu votre attention une seconde.
Or on avait pris jusque là, en règle très générale, le texte nazi au premier degré, tout particulièrement lorsqu'il semblait refléter des valeurs aux antipodes du code moral en vigueur (cruauté, cynisme, trahison, cupidité, nihilisme, etc. etc.), ce qui signifie que le travail historique n'était même pas commencé.
Ce que je raconte, personnellement, depuis bientôt vingt ans, c'est qu'il y a là, encore aujourd'hui, un chantier immense, où moi-même je ne sais guère où donner de la tête tant les tâches capitales sont partout.
Mais je donne ! et il est grossièrement faux que je me contente de généralités et d'abstractions. J'ai toujours les mains jusqu'au coude dans le concret et le cambouis ! Et mes abstractions reposent sur un nombre sans cesse croissant d'analyses serrées, à base de documents inédits ou jamais vraiment lus.
Ainsi sur la "terre brûlée". D'un côté le sujet est vierge et je n'ai pas le temps de le... décapsuler. Aucune étude, à ma connaissance, ne suit à la trace le bras de fer entre démolisseurs plus ou moins SS et préservateurs du ministère de l'Armement, en fouillant au maximum les liens des uns et des autres avec le bunker berlinois. Cependant, les textes de Speer (décryptés comme il se doit) et divers témoignages forment un corpus permettant de tirer des conclusions solides : Hitler donne à Speer l'ordre catégorique de tout détruire à l'approche de l'ennemi, il a toutes raisons de se méfier du zèle de l'exécutant et de le faire contrôler comme il le fait pour nombre de gens dans nombre de domaines depuis 1933, or l'ordre est systématiquement saboté. On peut donc tirer des conclusions fermes sur son double langage (sa méthode favorite, et, à ce degré, contrairement à ce que vous avancez, sans précédent dans la politique mondiale) : d'un côté, le visage intransigeant (et normal) d'un chef de guerre qui fait semblant d'y croire car sinon il n'y aurait plus de guerre, de l'autre une vue d'avenir aussi rationnelle que sacrificielle (périsse ce qu'il faut du nazisme, y compris moi, pourvu que vive l'Allemagne... et revive un jour le nazisme). |