... de réhabilitation, ce n'est pas le propos (en tout cas pas le mien).
Bien évidemment, l'outil militaire français de 1940 se révéle globalement inférieur à l'Allemand tout comme le soviétique un an plus tard... tout comme la totalité des appareils militaires du monde à cette époque. Les points mis en exergue par Jean-Robert sont justes (à l'exception des "paquets" de chars qui relèvent du bon mot - a ce jeu les Soviétiques disposent en juin 41 de nombre de paquets de 1000 sans plus de résultats): emploi et adaptation des matériels aux situation sont souvent mauvais, le plan général Dyle Breda "dégageant" l'unique réserve un peu rompue à la manoeuvre mécanique (l'armée Giraud), l'aviation trop faible, l'absurde séparation entre blindés d'infanterie et de cavalerie etc etc ...
Oui, bien sûr.
Mais. Ce qui est en jeu au plan historique c'est la nature et la spécificité supposée de cette infériorité globale française. Des défauts structurels, on en trouve partout: Le Panzer I (plus de 900) n'a rien d'un char et les réservistes allemands ont un moral souvent discutable. Jeter 1500 ou 2000 chars à travers le massif ardenais est pour le moins un pari risqué (la Wehmacht l'apprendra 4 ans plus tard) etc...
Le fait majeur n'est pas là. C'est le choc subi par l'armée française. Et ce choc est dû avant tout à l'incroyable ambition du plan d'attaque allemand servi par un poing mécanisé dont les principales qualités ne sont pas la puissance (thèse de Gaulle) mais la cohésion, la mobilité, l'endurance et un appui aérien révolutionnaire. En revanche, ce que parvient à faire la Wehrmacht partout de 39 à 41 voire encore un peu en 42, elle ne le refera plus jamais. Pourquoi ? Est-elle moins bonne ? Ses matériels "fin de guerre" sont-ils inférieurs ? Parce que cette manière de faire la guerre n'a été décisive qu'en ce qu'elle jouait sur ce fameux effet de choc moral. L'armée française n'est pas détruite parce qu'intrinsèquement incapable, ni parce qu'elle est sous-armée ou que ses matériels sont au dessous de tout, elle est détruite parce qu'elle est initialement si déséquilibrée que son moral s'effondre et que sa capacité de résistance ponctuelle (mainte fois démontrée, jusque sur la Somme, l'Aisne ou les Alpes) ne répond plus à aucune volonté globale à la différente de septembre 1914 (situation globalement comparable). L'absence de profondeur du champ de bataille au regard du moteur combattant et la crise militaro-politique sous-jacente font le reste. Mai 40, c'est presque une bataille hoplitique...
Cordialement
Vincent |