J'écrivais : "Désolé, ce sont des faits, pas de simples allégations. Vous écrivez par exemple qu'Aubrac a nié avoir été identifié sous ce nom de code par Barbie : c'est tout simplement faux, et je vous renvoie aux divers propos du susnommé."
Jean-Robert Gorce répond : "Comme, par exemple, lors de la table ronde de Libération ?"
A quoi je réponds : ce n'est pas tout à fait vrai. Au cours de cette Table ronde, Aubrac est pris à partie par des historiens manifestement incompétents (même Cordier, qui, avec Eczéma et Bouddharida, battra ici des records dans la stupidité et la cuistrerie), lesquels inventent dans ses témoignages des contradictions qui, en réalité, n'existaient pas. La mémoire d'Aubrac n'étant plus hyper-fraîche, et compte tenu de l'ambiance délétère qui plane sur cette réunion, il lâche des "je ne sais pas", "vous avez peut-être raison" embarrassés, et de bonne foi.
Mais il a eu par la suite l'occasion de s'expliquer, dans un article de Libération, "Ce que cette table-ronde m'a appris" (10 juillet 1997) : "Quelques jours plus tard, un lecteur de la transcription de cette scène eut l'idée de vérifier dans les documents reproduits en annexe du livre de Gérard Chauvy. Il me confirma que j'avais bien reconnu avoir été identifié par Barbie sous mon pseudonyme Aubrac, à plusieurs reprises, y compris publiquement lors du deuxième procès de Hardy, mais que dans aucune de mes déclarations je ne l'avais nié. Dans tous les cas, mes Mémoires récemment parus le soulignent, j'ai toujours déclaré que j'étais parvenu à ne jamais divulguer mon identité réelle, Raymond Samuel, pour des raisons bien évidentes. Ainsi l'accusation fondamentale de "contradiction", par trois historiens me transformant en une sorte de coupable en train d'avouer, était-elle une accusation inexacte."
Et c'est vrai. Voir les documents reproduits dans le bouquin de Chauvy : il n'a jamais nié avoir été identifié par Klaus Barbie comme étant Aubrac.
Par la suite, j'écrivais : "Je reconnais avoir eu recours à l'hypothèse dans le cas du retard de Moulin, mais l'hypothèse fait appel aux données connues, et ne jure pas avec elles. Au demeurant, vous ne la réfutez pas. ;-)"
A quoi Jean-Robert Gorce répond : "La seule explication du retard de Moulin repose sur le témoignage de Raymond Aubrac."
Faux. Deux autres témoignages sont à prendre en compte : celui de Serreulles, qui devait accompagner Moulin et Aubrac mais s'est trompé sur l'heure du rendez-vous (il est venu à 13 h, au lieu de 14 h), et celui de De Graaf, qui devait amener le colonel Schwartzfeld à Moulin et Aubrac. L'absence de Serreulles a retardé notre duo, de même que le retard de Scharztfeld. Le temps d'attente de la ficelle et du tram ont également pu jouer. Résultat : Moulin perd, à mon avis, une demi-heure ou plus.
Le fait est que les historiens n'ont même pas cherché à retracer la chronologie exacte de cet épisode. L'heure de la réunion n'est même pas connue avec certitude : 14 h ? Si oui, Moulin est lui-même responsable. 14 h 30 (plus probable) ? En ce cas, la demi-heure de retard se case parfaitement.
Donc, rien de bien mystérieux, je le répète.
[...]
J'écrivais : "Il est faux d'écrire que rien ne prouve la culpabilité de René Hardy."
Jean-Robert Gorce répond : "Moi j'affirme qu'il est faux de dire que sa culpabilité est démontrée."
Il est pourtant identifié comme tel par les rapports allemands. Lesquels comportent certes des inexactitudes de détail, qui ne remettent pas en cause le fond.
J'écrivais également : "Et j'ai fini par innocenter Aubry. Baynac a effectivement fait très fort, à propos du rendez-vous du petit-pont - développement que vous considériez comme "irréfutable"."
Jean-Robert Gorce répond : "Que je considère toujours..."
A tort. Lis les trois interrogatoires de Barbie auquel Baynac fait référence (sans les citer outre-mesure...), tu comprendras pourquoi. J'ai donné la référence plus haut.
J'ajoutais : "la démonstration est non seulement réfutable, mais encore frauduleuse. Baynac, selon sa vieille habitude dans l'affaire Caluire, a fait dire n'importe quoi à un témoin"
Jean-Robert Gorce répond : "Achtung tout de même à ne pas aller trop loin. Jacques Baynac n'est pas méchant, mais quand même !"
Il me ferait un procès, Baynac ? Je me ferais un plaisir de le démonter en audience...
J'ai confronté les interrogatoires de Barbie à ce que Baynac en retire. Ce n'est rien de dire qu'il a pris ses distances avec la méthodologie historienne. Mais j'y reviendrai...
[...]
J'écrivais, à propos de la simplicité de l'affaire : "Dixit le meilleur spécialiste du dossier, Daniel Cordier."
Jean-Robert Gorce objecte : "Mouais... On ne peut pas être juge et partie."
A quoi je réponds qu'on ne réfute pas ses argumentations par des attaques personnelles. Tu es face à Cordier, et tu lui réponds ça ? Il rigolera lourdement...
[...]
Je laissais ce constat désabusé : "Le reste n'est que recherche de scoop et théorie du complot, à jeter aux "poubelles de l'Histoire"."
Jean-Robert Gorce répond : "Faut bien gagner sa croute ;-))) Y'en a bien qui essaye de gagner la leur en faisant passer Hitler pour un génie..."
Je ne pensais pas à v... toi, mais à Marnham, Baynac, Chauvy, Vergès, Benfredj, Frenay dernières versions, et, à un degré moindre, Péan (pour sa mise en cause de Combat).
Et Hitler était très intelligent. S'il était con, il ne serait jamais arrivé aussi loin. Vous allez vous fâcher avec l'ombrageux Sir Hugh Trevor-Roper ! ;-)
Je précisais également : "Je ne pouvais pas croire ainsi que vous accordiez du crédit à cette histoire de Mme Brossier, sur la base d'une seule phrase de Lucie Aubrac..."
Jean-Robert Gorce réplique : "Il n'y a pas que Lucie Aubrac qui le dit, mais ça c'est une autre histoire"
Intéressant. Parce qu'en attendant, la seule source citée, c'est Lucie Aubrac. Et sa petite phrase perdue...
Au demeurant, comme je le disais, je ne vois pas vraiment ce que prouve l'affaire Brossier.
J'ajoutais : "Vous auriez du me confier le dossier. ;-)"
Jean-Robert Gorce avoue : "C'est vrai, mais les ventes auraient-elles été au même niveau ??? ;-)"
1) Je me tape du pognon, je fais de l'Histoire. En amateur, certes, mais tout de même.
2) Jean Moulin, c'est vendeur, quoi qu'on raconte à son propos - hélas...
[...]
J'y allais gaiement : "Hardy a été désigné comme étant le traître par deux filières indépendantes l'une de l'autre : Edmée Delettraz, qui a constaté de visu ladite trahison, et en a informé le réseau Groussard (plutôt versé à droite, et qui politiquement avait moins d'intérêt que les gauchistes à cibler un pote du réseau Combat) ; et, de mémoire, Lucie Aubrac (à vérifier), du moins son entourage."
Jean-Robert Gorce : "Si c'est tout, c'est peu. Entre la femme qui a donné Bertie Albrecht et une qui reconnait elle-même "enjoliver un peu la vérité", tes accusatrices sont plus que médiocres."
Oh oh, on se lâche, je vois... ;-)
Blague à part, je constate seulement que deux sources indépendantes ont accusé Hardy. Et le témoignage de Delettraz est bien plus fiable que tu ne le reconnais. Elle a livré Bertie Albrecht ? Et oui : ça n'en fait pas automatiquement une menteuse. Son témoignage est au contraire très fiable, et explique bien des choses (le retard de Klaus Barbie à Caluire, entre autres). Car elle faisait aussi partie de la Résistance et avait infiltré la Gestapo : il est historiquement prouvé qu'elle a tenté d'alerter - en vain - ses collègues de l'armée des ombres de ce qui se tramait à Caluire.
Quant à la phrase du style "Lucie conteuse", elle est hors-contexte : je cause, moi, de ses suspicions à l'égard de René Hardy, pas de Ils partiront dans l'ivresse.
Dans tous les cas de figure, nous avons deux sources indépendantes qui, dès le début, accuseront Hardy. Or, tu prétendais que tout partait de Lucie Aubrac : navré, mais là encore c'est tout simplement faux.
Mais peut-être y a-t-il eu un vaste complot englobant quelques têtes brûlées de Libération et le réseau Groussard pour dégommer Hardy et nuire à Frenay, à l'heure où la Résistance est en péril de mort ? Soyons sérieux.
Je poursuivais : "Larat ? Je retiendrai que votre clavier a dérapé..."
Jean-Robert Gorce : "Non, mais je n'ai pas dit que Larat avait donné volontairement la réunion. En revanche il semble qu'il était repéré et suivi depuis le mois de mai au moins."
Les documents allemands le démentent. Les témoins allemands ne l'ont, à ma connaissance, jamais reconnu. Et ils ne tenaient pas à le couvrir, pour une raison bien évidente... Ce qui, à mon avis, clôt l'affaire en ce qui concerne Larat.
Je concédais : "Quant à Aubry, j'admettais à la rigueur qu'il eût pu commettre des erreurs qui avaient contribué à la rafle de Caluire, sur la foi de la démonstration de Baynac sur le pont-Morand,"
Jean-Robert Gorce m'arrêtait : "Stop ! Aubry ne traine tout de même pas que le pont Morand comme casserole. C'est grâce à lui que les Allemands ont cravaté Delestraint. Et sa libération post-Caluire est plus que louche!"
Aubry a parlé. Et, sur ce plan, il a été le premier à craquer. Pas étonnant qu'il subisse un sort plus clément.
Que ses erreurs aient condamné Delestraint ne signifie nullement qu'il a contribué - volontairement ou non - à faire tomber Moulin et les autres. Les interrogatoires de Barbie révèlent d'ailleurs le rôle relativement négligeable d'Aubry dans son succès de Caluire. Et je ne parle pas des documents allemands...
Aubry a été imprudent, mais il n'est pas à l'origine de la rafle.
J'écrivais, à propos de Baynac : "ladite démonstration fait preuve d'une malhonnêteté crasse"
Jean-Robert Gorce me mettait en garde : "Encore Achtung."
Tttt... Rien à craindre je n'ai, ni sur un plan historique, ni sur un plan juridique. Et Baynac le sait très bien. Je suis d'ailleurs à peine plus méchant que Cordier. ;-)
Jean-Robert Gorce achevait son message ainsi : "Ok. Tu penses réellement à la culpabilité de Hardy. Soit. Mais ce qui m'amuse chez les "défenseurs forcenés" (je ne parle pas de toi) des Aubrac c'est que pour eux, démontrer (et où est la démonstration ?) que Hardy a donné la réunion disculpe totalement leur protégé. Alors que la culpabilité (non établie) de l'un ne prouve pas l'innocence (non démontrée) de l'autre."
Dans l'attente de nouvelles pièces, je dirais qu'en l'état du dossier tout désigne Hardy, et tout disculpe Aubrac.
[...]
J'ajoutais, sur ma démonstration : "En attendant, elle reste debout, non réfutée"
Tu réponds : "Si, par Jacques Baynac notamment."
A quoi je réplique : mort de rire.
Quant aux Medonje, ils ont disparu de la surface du Ouaibe depuis que j'ai anéanti toute la campagne de calomnies qu'ils avaient montés contre moi. Mais ils postent encore sur Usenet. Cela fait plus de deux ans, je crois, qu'ils m'avaient promis de réfuter un bouquin - il est vrai discutable - sur les Oustachi. J'attends encore, sans illusion (leur véritable objectif, c'était ma petite mais immodeste personne). |