Bonjour,
Le 6 août 1944, deux mois après le débarquement alliés en Normandie, Pétain, sur les conseils de son entourage, adresse à Laval une note stigmatisant les "méfaits" de la Milice. En voici quelques extraits:
"(...) Je n'ignore pas que la Milice montre une grande énergie dans la répression du terrorisme et qu'elle paie un lourd tribut à ses tentatives de rétablir l'ordre, mais cependant cette courageuse conduite n'excuse pas son attitude générale. (...) Les préfets sont unanimes à se plaindre d'être dessaisis, illégalement d'ailleurs, d'une partie importante de leurs fonctions. Ils n'ont plus aucun contrôle sur la police, ne possèdent plus aucun renseignement sur les mouvements terroristes et les opérations de police menées dans leur département; de plus, ils sont bien souvent suspectés eux-mêmes par les chefs miliciens qui se trouvent sous leurs ordres. (...)
Et Pétain d'énumérer quelques exactions de la Milice. A propos de Darnand, le maréchal roublard poursuit son "réquisitoire":
"M. Darnand, chef responsable de la Milice, sous vos ordres, est un chef loyal, consciencieux et c'est un glorieux soldat. Il ne nous est pas permis, sans en être les complices, de le laisser plus longtemps dans l'ignorance de ces faits qui, par l'état d'esprit qu'ils créent, nous mènent à la guerre civile. Il importe que M. Darnand, secrétaire général de la Milice et secrétaire d'Etat à l'Intérieur, prenne des mesures urgentes pour enrayer le drame qui se prépare. Sinon, la France, un jour libérée, verra son territoire transformé en un vaste champ clos de règlements de comptes...(...)"
Le maréchal n'a jamais manqué d'opportunisme. Le moment est bien choisi pour tenter de se désolidariser de la Milice. Darnand n'est pas dupe de la manoeuvre. A cette note que Laval lui a transmise, Darnand répond sèchement au maréchal:
"Pendant quatre ans, j'ai reçu vos compliments et vos félicitations. Vous m'avez encouragé. Et aujourd'hui, parce que les Américains sont aux portes de Paris, vous commencez à me dire que je vais être la tache de l'Histoire de France? On aurait pu s'y prendre plus tôt".
Bien cordialement,
Francis. |