[17 juin 1940]
En fait, dans le monde entier, toutes les personnes qui observent le déroulement de cette guerre, ou presque, pensent alors que son arrêt est une question de jours, ou de semaines tout au plus si Churchill s’obstine comme un enfant à refuser les réalités, et réussit à entraîner l’Angleterre dans ses errements. Pour qui admet ces prémisses, il est clair que la poursuite de la lutte nuirait essentiellement à la France et il peut apparaître conforme à l’intérêt national de mettre tout en œuvre pour son arrêt.
C’est ce qui amène le maréchal Pétain, qui a succédé le soir du 16 juin à Paul Reynaud comme chef du gouvernement français, à commettre son acte le plus dommageable : il appelle les Français à la cessation du combat dans son premier discours, celui du 17 juin à 12h 30, alors qu’il ignore non seulement les conditions allemandes, mais le temps que Hitler va mettre à répondre à sa demande d’armistice, adressée quelques heures plus tôt par l’intermédiaire de l’Espagne.
Comme Berlin laisse passer la journée sans répondre, on falsifie le discours le soir en transformant « il faut cesser le combat » en « il faut tenter de cesser le combat », mais un mal immense a été causé pendant ces quelques heures à la capacité française de résistance, déjà bien entamée. Et, pour répondre à un argument pétainiste classique suivant lequel l’armistice était préférable à une capitulation, la différence est ici assez impalpable ! Sauf qu’il ne s’agit pas seulement d’une capitulation militaire (prônée un bref moment, en métropole, par Paul Reynaud) mais bien de la reddition d’un pays tout entier, proclamée par son nouveau chef de gouvernement, qui est par ailleurs un prestigieux expert dont l’avis sur la situation militaire a quasiment force de loi. |