Fin du chapitre La guerre des nerfs - La Suisse et la guerre 1933 - 1945 - forum "Livres de guerre"
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Edition du 14 juillet 2008 à 21h46

La Suisse et la guerre 1933 - 1945 / Werner Rings

 

Fin du chapitre "La guerre des nerfs" de Christian Favre le lundi 14 juillet 2008 à 09h52

Un coup d'oeil rétrospectif

Comme les démarches de Trump, l'action menée par le «Volksbund» n'a d'importance historique que par le fait qu'elle a échoué, qu'elle n'a pas pu venir à bout de cette presse que Trump avait provoquée mais aussi cimentée pour la résistance par ces interventions très poussées.
A vrai dire, son insuccès est aussi dû à une faiblesse intérieure qui s'était fait remarquer avant même qu'une indiscrétion eût révélé le programme à réaliser immédiatement, ce programme qui fut ensuite mis au net pour être remis officiellement au Conseil fédéral et, finalement, envoyé confidentiellement à 56 rédactions, pour leur information. Au lieu des 500 signatures qu'on espérait recueillir pour la requête au Conseil fédéral, on n'avait réussi à en obtenir que 98, et encore s'agissait-il d'un nombre assez. élevé de signatures données par des gens ignorant de quoi il s'agissait ou induits en erreur. A des intervalles se mesurant par semaines ou par mois, le «Volksbund» produisit d'abord 45 signatures supplémentaires, puis 23. Finalement, il n'y eut que 43 signataires qui autorisèrent la communication de leurs noms à la presse; 123 signatures furent tenues secrètes.
Le Conseil fédéral laissa la requête en sommeil pendant six mois et demi, jusqu'à ce qu'il se décidât, en raison de la réaction extrêmement forte de la commission mixte de politique en matière de presse, à lui trouver une place dans les oubliettes de l'administration, avec l'accord des représentants du «Volksbund».
Ce n'est qu'après la guerre que le public fut informé en détail et que les noms des signataires furent divulgués. Il y eut quelques cas pénibles de diffamation, une sorte de chasse aux sorcières, des tragédies privées, des suicides. Quelques-uns des promoteurs et de ceux qui les avaient suivis subirent les conséquences funestes d'une «épuration», celle qu'ils avaient envisagée pour d'autres alors que la puissance du Troisième Reich était encore au zénith. On ne commença que plus tard à s'intéresser aussi aux promoteurs et aux sept expéditeurs de la «requête». Les signatures n'étaient pas rangées dans l'ordre alphabétique.
La première était celle d'un historien, l'archiviste du canton d'Argovie, Hektor Ammann, qui, disait-on, entretenait des relations particulièrement bonnes avec le Troisième Reich.
Les autres signataires étaient des hommes appartenant pour la plupart à des groupements d'intérêts nettement déterminés: un industriel (Caspar Jenny), un banquier (Emil Friedrich), un directeur de société d'assurance (An¬dreas von Sprecher) et un officier de carrière (le colonel Fritz Rieter). Il y avait encore un maître d'école (Heinrieh Frick) et un pasteur (Rudolf Grob).
Au début des relations que le « Volksbund» et Hektor Ammann entretenaient avec le Troisième Reich, plu¬sieurs personnes avaient connu personnellement Adolf Hitler.
Ammann avait fait la connaissance d'Hitler à Munich en 1920. Il l'avait souvent rencontré pour de longs entre¬tiens.
D'autres membres importants du «Volksbund» l'avaient rencontré à Zurich en 1923, dans cette ville où le chef de la NSDAP avait développé ses idées politiques devant des industriels et des banquiers qui avaient conservé un fort mauvais souvenir de la grève générale. Il en aurait reçu à cette occasion des sommes considérables. Suivant les constatations faites par la police et la justice en liaison avec le putsch d'Hitler de 1923, il y avait parmi les soutiens et bailleurs de fonds d'Hitler plusieurs membres du «Volksbund». L'un d'eux était l'industriel zurichois Oehler, dont le frère Hans, qui rédigeait avec Hektor Ammann l'organe du «Volksbund» - les Schvreizer Monatshefte für Politik und Kultur -, avait rencontré également Hitler à Zurich.
Au cours de la même année, Ammann fit la connaissance du futur Reichsführer Hans Steinacher, qui essaya en 1935 de le faire de nouveau rencontrer Hitler.
Dans une lettre envoyée à cet effet en 1935 à la chancellerie du Reich, Steinacher assurait qu'Ammann et Andreas von Sprecher «exerçaient dans une mesure extrêmement importante, en Suisse et à l'étranger neutre, de hautes fonctions pour la Grande Allemagne (gesamtdeutsche Funktionen), des fonctions qui devaient cependant rester rigoureusement secrètes». Steinacher, qui avait d'abord rencontré Ammann à Bâle, ajoutait qu'Ammann pouvait être sur place dans le délai de deux jours. De son côté, le ministère des affaires étrangères recommandait que l'audience que pourrait accorder Hitler fût tenue tout à fait secrète. Hitler ne voulut cependant pas l'accorder.
Le fanatisme politique d'Ammann paraît aussi ressortir du fait qu'il était actionnaire d'un journal que les autorités suspendirent d'un jour à l'autre, en décembre 1939, en raison de ses attaches financières et rédactionnelles avec le Troisième Reich : la Neue Basler Zeitung. En dépit de démarches répétées du ministre d'Allemagne, la suspension ne fut pas rapportée. Suivant les indications du ministre de la propagande, Berlin finançait discrètement le journal en pourvoyant à ce que 50000 exemplaires partent pour l'Allemagne, alors que 3000 exemplaires tout au plus étaient placés en Suisse. Amnnann avait été un certain temps vice-président du conseil d'administration de cette entre¬prise. Etant donné l'ensemble des choses, il y avait une raison suffisante pour lui attribuer la première place parmi les promoteurs de la «requête».
On peut d'ailleurs compléter le tableau en signalant qu'un autre membre important du «Volksbund», l'avocat Wilhelm Frick (1894-1961), qui se manifesta particulièrement au public comme le défenseur et le porte-parole des pro¬moteurs, avait montré au moins dans la période d'avant-guerre des sympathies pour le Troisième Reich et était l'un des avocats-consultants du consulat général d'Allemagne a Zurich.

Le mauvais choix

Cela étant, il est permis de se demander comment il était possible que des Suisses qui travaillaient si ouvertement pour les nationaux-socialistes allemands puissent encore être tenus pour de bons patriotes et que des organes haut placés de l'administration les chargent de conversations «privées» sur des questions d'ordre journalistique et économique avec une douteuse délégation allemande. I1 y a une explication.
Les membres du «Volksbund» et leurs amis n'étaient ni des nationaux-socialistes ni des frontistes au sens commun du terme. Eux-mêmes considéraient les frontistes dans l'été 1940 comme des «desperados». La plupart. d'entre eux appartenaient à la bonne et même à la meilleure société. Ils furent traités avec des égards. Au reste, aucun n'avait commis d'acte punissable. En présentant leur «requête», ils n'avaient, comme l'écrivait plus tard le rédacteur en chef du Bund, rien fait d'illégitime, quand bien même ils demandaient une chose illégitime, à savoir que l'ordre public démocratique se détruise lui-même. Dans les questions controversées con¬cernant la presse, ils étaient largement d'accord avec le Conseil fédéral et le Général, encore que ce fût pour des raisons diverses. Enfin, ils défendaient des intérêts très concrets de l'industrie d'exportation, qui avait besoin du marché allemand et n'était guère dis¬posée à faire des sacrifices.
S'ils se mirent néanmoins dans leur tort et si le Conseil fédéral finit aussi par les laisser tomber, cela est dû au fait qu'ils restaient fidèles à des idées depuis longtemps dépassées. Comme le formula Herbert Lüthy, ils n'avaient «rien appris» depuis le temps de la grève générale et celui des échauffourées du «printemps des fronts».
Leur mentalité les empêchait de con¬sidérer que c'était la Wehrmacht allemande et non pas l'armée rouge soviétique qui encerclait la Suisse et la menaçait. Ils ne pouvaient pas mieux
comprendre comment ceux qui s'affrontaient autrefois dans la lutte des classes et qui représentaient un éventail allant de la bourgeoisie conservatrice jusqu'à la gauche, celle des anciens meneurs de la grève générale - s'étaient unis depuis longtemps pour défendre ensemble le régime démocratique contre les puissances totalitaires.
Lorsqu'ils voulurent rompre ce large front défensif, ils se virent rapidement isolés, malgré la bienveillance du Conseil fédéral.
Il manquait bien peu pour reconnaître qu'ils avaient choisi le mauvais camp dans une phase critique de la guerre des nerfs.

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