Fusillés pour l'exemple - Les fusillés de la Grande Guerre et la mémoire collective (1914-1999) - forum "Livres de guerre"
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La description du livre

Les fusillés de la Grande Guerre et la mémoire collective (1914-1999) / Nicolas Offenstadt

En réponse à
-1Pour l'exemple !... de Contributeur sans E-mail valide

Fusillés pour l'exemple de Francis Deleu le mardi 07 janvier 2003 à 00h38

Bonsoir,

"Ils méritent notre profonde compassion" dites-vous en parlant des "fusillés pour l'exemple". Je vous rejoins entièrement.
Les fusillés pour l'exemple! Mais aussi ceux, des compagnies entières, qui reçurent l'ordre criminel de monter à l'assaut pour... l'exemple et qui se faisaient massacrer volontairement par leur propre artillerie... sur ordre. On n'en connait pas le décompte. Ceux aussi qui n'ont même pas eu droit à un simulacre de jugement qui furent fusillés sans explications comme nous le raconte le soldat Yves Waterlot.

Je pense que l'auteur et la maison d'édition ne m'en voudront pas de reproduire la lettre d'un poilu, publiée en annexe de l'ouvrage. Une lettre banale, d'une banale simplicité, pour une affaire banale...l'horreur au quotidien!


Lundi 11 août 1915
Cher Cousin,
J'ai reçue ta lettre et j'ai vu avec plaisir que tu étais en bonne santé tant qu'à moi il en est de même. Je vais te raconter le tour qui m'est arrivé il y a 4 mois. C'était le 6 septembre à huit heures du soir. À cette heure là nous avons arrivé près d'un bois situé entre Lachie et Les Essarts dans la Marne et l'on s'apprête pour y coucher le long du bois. L'on va chercher du foin et des bottes d'avoine qui étaient à proximité puis l'on se couche. En avant de nous nous avions comme avant postes le 25ème Bon de chasseurs et le 270ème d'infrie.
Vers 11 heures arrive une auto-canon allemande qui lance une dizaine d'obus et le 270ème qui était en avant de nous fout le camp et passe en débandade à côté de nous en criant "Sauve qui peut". Nous nous réveillons en sursaut nous nous équipons à la hâte et l'on en fait autant. Il yen a qui se sauvèrent à droite d'autres à gauche.
En me sauvant je me mélangeai avec le 270ème qui avait passé à notre droite et quand je vis mon erreur je commençai à chercher après le 327ème. En cherchant de groupe en groupe j'eus la malchance de me foutre dans les mains du général de division avec six autres. Il nous demanda à quel régiment nous appartenions, nous lui dîmes que nous étions du 327ème. Il fit appeler un sergent du 3ème génie et nous dit de le suivre. Celui-ci nous emmena dans une grange et nous dit de déposer nos armes dans un coin et de nous coucher sur la paille. Nous fîmes comme il nous dit et aussitôt que nous fûmes couchés il fit enlever nos fusils et fit placer une sentinelle à la porte. Nous nous demandions ce que cela voulait dire. Cinq minutes après arrive l'aumonier militaire qui nous dit de faire nos prières avec lui. Nous lui demandons pourquoi. Il nous dit qu'ayant appris qu'il se trouvait des soldats dans la grange il était venu pour leur donner la bénédiction et que cela il le faisait partout où il passait. Mais cela ne nous disait pas ce que l'on nous réservait. Le lendemain matin nous partîmes encadrés par 8 hommes du génie baionnette au canon et l'on nous conduisit au quartier général et un moment après arrivait le colonel du 327ème qui avait été appelé par le général. Ils s'expliquèrent ensemble pendant au moins un quart d'heure puis le général ordonna à notre colonel de nous emmener. C'était pour nous fusiller et c'était nous qui aillions payer pour le 270ème. L'on nous emmena en face d'une meule l'on nous banda les yeux et l'on plaça une section environ 39 hommes à 12 m de nous. J'étais placé à droite et nous nous étions donné la main à l'un l'autre. À la 1 re décharge je me laissai tomber mais je n'avais rien, puis l'on fit retirer une fraction du peloton sur ceux qui bougeaient encore. Ensuite l'adjudant qui était là vint pour nous donner le coup de grâce en nous logeant une balle dans la cervelle. Il commença par la gauche et quand il eût tiré sur les 2 premiers il dit au capitaine qui commandait qu'il ne pouvait plus continuer que ça lui faisait trop de peine. Le capitaine lui dit de s'assurer si nous étions bien morts et en passant il nous fit bouger en nous pressant par les épaules, ce n'était pas le moment de bouger. Quand il eût passé d'un bout à l'autre il dit au capitaine que nous étions tous morts et le capitaine emmena le peloton. Nous étions encore à deux de vivant un de St Amand qui avait la jambe cassée et moi qui n'avait rien. Je restai encore là au moins 2 heures et ensuite je me suis sauvé avec le 233ème et le lendemain je retrouvai le 327ème vers 11h du matin. En arrivant j'ai cherché après le Commandant de notre bataillon et je suis allé le trouver. Je lui racontai ce qui s'est passé et je lui dis que j'étai revenu me mettre à sa disposition et que je demandai à partir en première ligne. Il me dit qu'il allait référer mon cas au Colonel et qu'en attendant je pouvai rentrer à ma compagnie. Ensuite il alla trouver le Colonel et tous deux ils allèrent trouver le général. Une 1/2 heure après ils revinrent et me firent (après raturé) appeler ainsi que le lieutenant commandant notre Ce. Le Colonel me dit que j'étais grâcié et qu'il ne fallait plus y penser, qu'il avait son possible auprès du général pour empêcher que l'on nous fusille mais que le général voulait un exemple et s'était montré inflexible dans sa décision. Et ce fut de cette manière que l'on nous tua sans nous dire quoi que ce soit et sans faire d'enquête. Depuis j'ai été cité à l'ordre du jour pour avoir demandé à repartir au feu après avoir été blessé au dos le 15 octobre dans une attaque que nous fimes pour reprendre un pont en avant de Reims entre La Neuvillette et Courchy. Le principal est que je suis toujours en bonne santé [...].

Bien cordialement,
Francis.

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