Bonsoir Igor, bonsoir à tous,
Jean Boutron raconte que ces rixes continuerent même jusqu'en 1944.
« C’était en Atlantique ou en Manche lorsque, sous le rigoureux mais calme et méthodique commandement opérationnel britannique, j’éprouvais intensément le sentiment d’être à la fois totalement libre et profondément intégré dans une gigantesque communauté n’ayant qu’un unique objectif : la victoire, et qu’une unique voie pour l’atteindre : la fraternité
Les choses changèrent, hélas, très durement pour moi lorsqu’au début de 1944 je me trouvai être avec une corvette, le "Commandant-Détroyat", à Casablanca et sous commandement opérationnel francais, une sorte de « cobaye » de la première tentative de « fusion » de la minuscule Marine Française Libre et Combattante avec quelques morceaux de l’ex-grande Marine Nationale encore prisonnière de ses rancunes et de ses erreurs. Il nous fallut alors, mon équipage et moi, essuyer sans cesse des rebuffades et des affronts qui atteignaient très souvent la limite de ce qui était tolérable, mais je m’étais promis d’être patient et magnanime et j’avais adjuré mes marins de faire les sourds devant les gracieuses appellations de « déserteurs », de « mercenaire », de « vendus aux Anglais » qui leur étaient prodiguées. Ils m’avaient merveilleusement obéi et aucune provocation ne parvenait à entamer notre calme et à rompre notre harmonie
Un soir, cependant, la limite de l’acceptable avait été largement franchie par un groupe de marins du "Tigre" qui avaient pris violemment à partie, sur la digue, un groupe de marins du "Detroyat" qui allaient regagner leur base. Les miens avaient fini par se fâcher et par lancer le mot de « lâches » qu’ils avaient depuis si longtemps réussi à retenir. La bagarre avait aussitôt commencé et comme elle se passait à proximité de notre coupée, mes marins, en force, avaient administré une raclée aux autres.
…."
Cordialement
Laurent |