De la neutralité belge ! - A livre ouvert ... - forum "Livres de guerre"
Pour profiter de
tous les avantages
de ces pages, vous
devez accepter
les cookies



Forum
des livres, revues, sites, DVD, Cd-rom, ... , sur la 2e Guerre Mondiale, de 1870 à 1970
 
 Le débat sur ce livre
 
 L'accueil
 Le menu
 Le forum
 Les livres
 Ajouter un livre, ...
 Rechercher
 Où trouver les livres ?
 Le Glossaire
 Les points
 Les pages LdG
 L'équipe
 Les objectifs
 La charte
 Droit de réponse
 L'aide
 
 
 

 


La description du livre

A livre ouvert ... / les contributeurs de "Livres de Guerre"

En réponse à
-1Pouvait-on, raisonablement, avoir la France pour allié en 1939 ? de Jacques Ghémard

De la neutralité belge ! de Francis Deleu le dimanche 22 décembre 2002 à 18h48

Bonsoir,

Depuis l'accession d'Hitler au pouvoir, Français et Anglais se sont contentés de gesticuler et de démissionner devant les faits accomplis: occupation de la Rhur, Munich, etc...etc... jusqu'à l'invasion de la Pologne où on gesticula un peu plus fort que d'habitude en déclarant la guerre tout en refusant de s'y engager.

Je répondrai plus longuement à la question subsidiaire, celle de l'attitude des Belges et leur neutralité tant décriée car la neutralité belge, souvent méconnue ou ignorée, mérite quelques éclaircissements. Sans vouloir tracer toute la genèse de la Belgique, rappelons-en quelques lignes directrices et posons quelques points de repères indispensables à la compréhension des évènements ultérieurs. Je reprends dans les grandes lignes, sans modifications importantes, ce que j'en pensais, il y a quelques années, sur feu le forum "Histoire.org".

Le territoire belge, champs de bataille depuis des siècles, occupé, au gré des guerres, des alliances et des traités par tout ce que l'Europe a compté de nations belliqueuses et conquérantes, se révolte contre le dernier occupant: les Pays-Bas.
Nous sommes en 1830. La Belgique voit le jour. Née d'une révolution, elle devient nation indépendante. Certains diront un Etat artificiel, d'autres un Etat tampon entre les grandes puissantes...peu importe…un Etat indépendant de toute manière. Au préalable, ce nouvel Etat est porté sur les fonds baptismaux par les puissances européennes. L'Angleterre et l'Allemagne, se souvenant de Napoléon Bonaparte, en sont les plus chauds partisans. Ils voyaient ce nouvel Etat comme une garantie de l'équilibre européen. La France emmenée par Talleyrand traîna des pieds. Animée de projets d'expansion, elle préférait un partage plus ou moins équitable du territoire convoité. Elle céda rapidement et finalement se rangea à l'avis de tous. La Conférence de Londres consacra finalement l'Etat belge.
Sans entrer dans les détails, la Conférence de Londres reconnaît l'existence de la Belgique indépendante et souveraine. Ajoutons un autre repère essentiel: la Belgique est proclamée "perpétuellement NEUTRE sous la garantie des puissances".

Retenons bien ces deux points! Quitte à nous répéter: Une Belgique INDEPENDANTE et SOUVERAINE d'une part; une Belgique tenue à une stricte NEUTRALITE d'autre part. Les nations européennes s'en portant solennellement GARANT.

Le gouvernement belge s'y conforma strictement tout au long de son histoire. Il faut donc bien en saisir le sens pour mieux comprendre la position de la Belgique tant en 1914 qu'en 1939/40. Il lui est tout simplement interdit de prendre position en faveur de l'un, plutôt qu'en faveur de l'autre. La France d'un côté, l'Allemagne de l'autre l'ont souvent rappelé en fonction de leurs intérêts militaires réciproques et contradictoires. Comme, par ailleurs, ils ont souvent feint de l'ignorer pour les mêmes raisons. Pour enfin mieux le reprocher par la suite.

En 1870 (guerre franco-allemande), la Belgique réussit à conserver son statut de neutralité. Léopold II mobilise cependant 800.000 hommes le long de la frontière française pour défendre l'intégrité du territoire. La Belgique ne prend aucune position officielle dans ce conflit malgré les craintes suscitées par la découverte d'un plan secret d'annexion de la Belgique et du Luxembourg par les troupes de Napoléon III.

1914. Après Sarajevo, la Belgique estime devoir rester en dehors d'un conflit imminent qui ne la concerne pas et dans lequel elle n'a aucun intérêt. Neutralité ne veut cependant pas dire pacifisme! Lorsqu'il fut clair que la guerre était devenue une réalité incontournable, le gouvernement proclame la mobilisation partielle et, suite à l'ultimatum allemand adressé à la France et à la Russie, la mobilisation générale. Aussi bien le Roi Albert, le gouvernement, l'Eglise et tous les partis politiques lancent de pressants appels pour éviter le pire.
L'ultimatum du 2 août 1914, par lequel l'Allemagne exige le libre passage de ses troupes à travers le territoire belge pour contrer une prétendue invasion française, est rejeté unanimement par le gouvernement belge indigné qui décide d'utiliser tous les moyens qui étaient en son pouvoir afin d'empêcher toute atteinte à ses droits.

Que les lecteurs me pardonnent tous ces détails; ils leur sont proposés pour expliquer d'une part que la Belgique est ombrageuse lorsque son indépendance et sa neutralité sont mis en cause et, d'autre part qu'elle défendra vigoureusement ce deux principes acquis ou imposés en 1830.
Dans ce contexte, l'invasion du 4 août 1914 est à considérer non pas, de prime abord, comme l'entrée en guerre de la Belgique mais avant tout comme une violation flagrante de sa neutralité. Et…dans le cadre de la Conférence de Londres…un casus belli pour l'Angleterre et la France garante. Et c'est dans ce cadre là que la Belgique décide de faire appel aux garanties britanniques, françaises et russes pour faire respecter sa neutralité.

Le tribut payé par la Belgique dans cette guerre qu'elle ne souhaitait pas, fut très lourd, on le sait. On n'insistera jamais assez que de tous les pays belligérants, la Belgique fut le seul pays à être occupé quasi intégralement pendant toute la durée du conflit. Cette occupation fut atroce. Le sort des soldats belges, sur le front de l'Yser, fut des plus misérables sans arrière-pays, coupés de leurs familles. Même les permissions devenaient corvée. Où aller avec une maigre solde? En France? Où ils tentaient de se "distraire" on les appelait les "Ploucs" par comparaison aux "Poilus". ..Stop! Ce n'était qu'une petite digression pour comprendre pourquoi les Belges ont parfois la susceptibilité à fleur de peau.

Entrée en guerre contre l'Allemagne, aux côtés de ses autres garant, la Belgique était libérée, de facto, de son devoir de neutralité et des obligations de réserve qui en découlaient. Elle fut partie prenante au Traité de Versailles et de Locarno.
Au Traité de Versailles, la Belgique est affranchie de sa neutralité et s'acquitte de toutes ses obligations. Elle se comporte notamment en fidèle alliée de la France. En 1923, elle soutient la France dans la difficile occupation de la Rhénanie, elle signe le Traité de Locarno, etc…
Mais la Belgique n'obtient rien en échange. La prolongation de la ligne Maginot lui est refusée. Sans être stratège, on comprend immédiatement qu'une agression allemande contre la France contournerait la ligne Maginot en passant par le territoire belge. Pétain, alors ministre de la guerre, ne déclarait-il pas qu'il se réservait la Belgique comme un magnifique terrain de manoeuvre. On s'en doute, les Belges n'apprécient pas ce genre de fanfaronnade.

Ensuite que restait-il d'autorité à la SDN (Société des Nations)? Le 20 octobre 1935, l'Italie avait envahi l'Ethiopie ne suscitant que quelques sanctions économiques, rapidement abandonnées.

Que restait-il du Pacte de Locarno? Le 7 mars 1936, les troupes d'Hitler envahissent la Rhénanie sans susciter la moindre riposte des alliés si ce n'est verbale et sans lendemain.

Sur le plan économique et la crise aidant, les frontières dressent autour de la Belgique des murailles douanières de plus en plus impénétrables. Or ces mesures frappent durement la Belgique, petit pays qui, sans grandes ressources propres et par sa position géographique, ne peut vivre que dans la liberté des échanges commerciaux.

Dès lors, en 1936, la Belgique opta à nouveau, formellement, pour une politique dite de "mains libres" ou d'indépendance exclusivement et intégralement belge.

La décision belge suscite en France de violentes réactions hostiles. La France reprocha à la Belgique de rompre ses alliances, de dénoncer le Traité de Locarno, de tourner le dos à la SDN. C'était oublier ou feindre d'oublier que c'était chose faite, nous l'avons vu plus haut, de par la carence franco-britannique. C'était ignorer que, vue de l'extérieur, la France n'était pas un modèle de pacifisme, mais un pays réputé prompt à dégainer le sabre (ou brandir le Chassepot ou le Lebel); jamais non plus le dernier pays à guerroyer, de préférence sur terrain neutre. Les hauts faits d'armes qui ont fait la gloire de la France n'ont pas la même saveur chez ses voisins, c'est le moins que l'on puisse dire. La Belgique néerlandophone n'a pas oublié Napoléon et n'a toujours pas pardonné la francisation complète du pays. Essayons de comprendre cette méfiance flamande vis à vis de la France par un exemple simple: imaginons que demain, par souci d'efficacité, la Communauté Européenne décide d'imposer l'Anglais comme seule langue encore admise dans l'administration, l'armée, les écoles, etc… des pays membres.

14-18, ses atrocités, ses combats "héroïques" aux finalités douteuses mais plus souvent flatteuses pour quelques chefs de guerre, friands de distinctions honorifiques. A quel prix? La perception de ces batailles sans lendemain n'est pas la même chez les uns et chez les autres. Massacres inutiles pour les uns, glorieuses batailles pour les autres. Tout cela est gravé dans la mémoire collective de la Belgique.

Cette digression pour tenter d'expliquer la position belge et montrer combien les reproches dont la Belgique fut accablée étaient injustes et injustifiés. Elles empoisonnèrent malheureusement les relations franco-belges pendant quelques années.

Ajoutons qu'après quelques semaines de récriminations de pure forme, les gouvernements britannique et français reconnurent la légitimité de la nouvelle position internationale de la Belgique tout en maintenant à son égard les engagements d'assistance. La neutralité belge les arrangeait fort bien, la France en particulier, reculant ses frontières "militaires" de quelques centaines de kilomètres. En somme, la Belgique retournait à la case de départ, celle de sa création.

Neutralité ne signifiait pas pour autant "pacifisme"! La Belgique se mobilisa dans tous les sens du terme. Sait-on, par exemple, qu'en 1938, le gouvernement belge voulut acheter 500 avions à la Grande-Bretagne? Elle ne ménagea aucun effort pour oeuvrer désespérément en faveur de la paix sans être dupe de ce qui se préparait. Elle était parfaitement consciente des nuages qui s'accumulaient sur l'Europe, clairvoyante sur les intentions de Hitler... mais aussi clairvoyante sur l'incapacité de ses alliés "objectifs" à faire face aux menaces. En mai 1940, elle tint ses engagements militaires et lorsque l'armée belge capitula "en rase campagne", elle était seule face aux hordes allemandes... le corps expéditionnaire britannique ayant embarqué à Dunkerque et l'armée française étant en pleine déroute.

Bien cordialement,
Francis.

*** / ***

lue 3706 fois et validée par LDG
 
décrypter

 



Pour contacter les modérateurs : cliquez !

 bidouillé par Jacques Ghémard le 1 1 1970  Hébergé par PHP-Net PHP-Net  Temps entre début et fin du script : 0.01 s  5 requêtes